Madame la présidente, monsieur le ministre, mes chers collègues, je voudrais tout d’abord vous faire part d’une satisfaction, ce qui est assez rare dans le budget de l’agriculture – on en arrive à se satisfaire quand plus rien ne bouge, tant les choses ont tendance à bouger dans un sens négatif… Je me réjouis du revirement du Gouvernement sur la baisse du financement des chambres d’agriculture et leur régionalisation. Cette décision présentait un bilan très négatif : pas d’économies pour l’État, pas de baisse de charges significative pour les agriculteurs et une déstabilisation majeure des chambres départementales d’agriculture au moment même où l’État leur confie de plus en plus de missions. C’était une erreur stratégique. Il faut donc se réjouir du maintien de cette taxe.
Je voudrais ensuite évoquer une fausse information : le budget de la mission ne se donne pas les moyens d’aider notre agriculture à grandir. En affichage, ce budget, après un passage à l’Assemblée nationale, augmente. Toutefois, à y regarder de plus près, l’essentiel des mouvements provient du réengagement habituel des contrats pluriannuels portant sur les mesures agroenvironnementales et climatiques (MAEC).
Les autres décisions sont subies : Brexit, évolutions de la réglementation européenne sur la politique sanitaire, corrections budgétaires compte tenu de la budgétisation peu sincère de la loi de finances de 2019…
Finalement, les seules mesures décidées par le ministère en faveur de l’agriculture cette année sont des crédits supplémentaires pour financer des dépenses informatiques et pour préparer le recensement agricole à hauteur de 25 millions d’euros. On est loin d’un budget annonçant un grand plan au bénéfice des agriculteurs. Pis, cette hausse des crédits est compensée par une baisse de la réserve pour aléas des agriculteurs de 25 millions d’euros.
Monsieur le ministre, ce n’est pas de ce budget de gestion boutiquière que l’agriculture a besoin. Les agriculteurs sont dans la rue, car ils veulent avoir un cap clair. Ils veulent éviter la politique du « en même temps ». En d’autres termes, ils veulent un budget visionnaire. Or rien n’est prévu pour l’innovation en agriculture, pour le développement du numérique, pour adapter les agriculteurs aux risques climatiques auxquels ils sont exposés… Des équipements déjà commercialisés aujourd’hui permettent de réduire à très court terme l’usage des produits phytopharmaceutiques de 30 % à 90 %. Ces solutions sont pour l’instant très onéreuses. Pourquoi l’État ne pourrait-il pas soutenir leur acquisition individuelle ou collective au regard de leurs effets tant sur l’environnement que sur la compétitivité de notre agriculture ?
Notre sentiment est que l’État en demande toujours plus aux agriculteurs, sans jamais lui-même se demander ce qu’il peut faire pour les accompagner. Le rapport sur la sortie du glyphosate de nos collègues députés En Marche le démontre très bien.
Pour ces raisons, la commission des affaires économiques a émis un avis défavorable sur les crédits de la mission. Elle vous appelle toutefois, mes chers collègues, par cohérence et pour soutenir l’innovation en agriculture, à adopter les crédits du Casdar.