Intervention de François Bonhomme

Réunion du 5 décembre 2019 à 14h30
Loi de finances pour 2020 — État b

Photo de François BonhommeFrançois Bonhomme :

Monsieur le ministre, vous dites que le pass culture est utilisé à hauteur de 40 % pour acheter des livres. Sans doute faudrait-il procéder à une analyse beaucoup plus fine, d’une part parce que le dispositif n’est expérimenté que dans quatorze départements, d’autre part parce que le retour d’expérience est relativement faible.

Ensuite, il faudrait se demander dans quelle mesure ce pass n’est pas utilisé par un public qui est déjà culturellement bien doté et si cette aide financière ne sert finalement pas, au moins en partie, à effectuer des achats qui auraient été faits de toute façon.

J’en viens au sujet que soulève notre collègue Ouzoulias dans son amendement.

En France, des librairies continuent à fermer, singulièrement des librairies indépendantes, non pas dans des villes moyennes, mais dans de petites villes. C’est un mouvement de fond dont on ne mesure encore ni l’étendue ni les dégâts qu’il va provoquer.

Tout le monde pose la question du soutien au réseau des librairies indépendantes, mais je crains que, à court terme, la question ne se pose plus du tout, tout simplement parce qu’il n’y aura plus de librairies ! Le mal est très profond. Certes, vous n’êtes pas responsable de cette situation, monsieur le ministre.

Je précise par ailleurs que le nombre de lecteurs tend à diminuer, que les lecteurs vieillissent, ou plutôt les lectrices, le lectorat étant composé, paraît-il, à 80 % de femmes. En tout cas, il n’y a plus suffisamment de lecteurs. On devrait s’interroger sur ce point.

Dans le même temps, on s’interroge dans certains pays sur l’enseignement à l’école de l’écriture cursive. C’est dire si l’écrit est attaqué dans toutes ses dimensions ! Nous assistons à un affaiblissement de l’écrit qui me paraît durable.

Nous vivons aujourd’hui, sous les coups de boutoir du numérique, de la high-tech et des écrans en général, un bouleversement majeur, de nature anthropologique, dont on n’a pas encore mesuré tous les effets ici. Il ne s’agit pas simplement d’un changement de support, du passage du papier à l’écran : c’est l’écrit qui est menacé.

Les questions posées et les réponses qui y sont apportées ne sont pas à la hauteur de l’enjeu, qui est majeur. À titre personnel, je regrette que l’école elle-même soit le lieu d’intrusion du numérique à tout-va, sans aucune forme d’interrogation.

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion