Intervention de Jean-Louis Borloo

Réunion du 30 janvier 2007 à 16h00
Droit opposable au logement — Discussion d'un projet de loi déclaré d'urgence

Jean-Louis Borloo, ministre de l'emploi, de la cohésion sociale et du logement :

Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le texte qui vous est aujourd'hui présenté prévoit diverses mesures en faveur de la cohésion sociale. L'un de ses articles revêt une importance particulière parce qu'il pose un acte politique, sociétal, social et humain fondamental pour notre pays.

Le logement n'est pas seulement une affaire de statistiques. Il n'est pas forcément non plus une affaire d'ingénieurs. Dans les sociétés modernes, notamment urbaines, les individus et les familles ont besoin d'un nid. Le logement, c'est l'habitat, c'est l'endroit où l'on fabrique sa personnalité. C'est l'endroit où l'on peut disposer d'une corde de rappel quand les choses vont mal.

Tout le monde sait que le véritable isolement et la vraie pauvreté résident en réalité dans l'absence de logement décent. Un certain nombre de personnes mènent d'ailleurs un combat à cet égard depuis vingt ans. Nul n'ignore que les échecs scolaires trouvent essentiellement leurs causes dans des conditions de logement inadaptées ou insalubres. De même, on connaît la relation entre le logement et l'emploi : le premier influe directement sur la capacité à trouver un emploi ; inversement, l'absence d'emploi peut conduire à la perte de son logement.

Après que le Parlement, dans la loi du 31 mai 1990 visant à la mise en oeuvre du droit au logement, dite « loi Besson », eut fait de la garantie du droit au logement « un devoir de solidarité pour l'ensemble de la nation », après que le Conseil constitutionnel eut affirmé, dans une décision rendue en 1995, que la possibilité pour toute personne de disposer d'un logement décent était un objectif de valeur constitutionnelle, le présent texte, prenant acte du fait que l'offre de logements n'a pas correspondu à la demande entre 1990 et 2002 ou 2003, a pour ambition de nous donner les moyens de rendre effectif le droit au logement en le rendant opposable, au même titre que l'éducation ou la santé. En effet, la décision du Conseil constitutionnel n'y suffisait pas.

Ce texte n'a ni pour vocation ni pour objet de rendre le logement gratuit. Un ancien premier ministre avait jadis déclaré qu'il ne voulait plus de bidonvilles dans un délai de cinq ans. À l'époque, de grands programmes avaient été lancés. Dans les mêmes conditions, avec ce texte, nous nous fixons l'obligation absolue d'engager les chantiers de construction nécessaires aux besoins et nous nous en donnons les moyens. Nous n'accepterons plus que, au cours de longues périodes, on construise moins qu'il n'est nécessaire en raison de l'émiettement du pouvoir de décision entre différents statisticiens et prévisionnistes, consécutivement à la décentralisation.

Évidemment, on nous objectera peut-être que ce texte ne fera pas « pousser les constructions », que ce projet est trop ambitieux, trop rapide. Mais nous ne pouvons plus attendre. Chacun d'entre nous, à son poste de responsabilité, qu'il se situe dans le secteur public ou dans le secteur privé, doit se donner les moyens pour que la période noire qu'a connue notre pays ne se reproduise plus jamais.

Dois-je vous rappeler que, à l'époque de l'appel de l'abbé Pierre, 200 000 logements, toutes catégories confondues, étaient construits tous les ans en France, et que, pendant une dizaine d'années, nous n'avons cessé d'augmenter le nombre de ces constructions pour les porter à 600 000 par an ? Puis, cela s'est effondré, ...

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion