Intervention de Didier Mandelli

Réunion du 17 décembre 2019 à 14h30
Application du cinquième alinéa de l'article 13 de la constitution et mandat des membres de la hadopi — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi organique dans le texte de la commission et d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Didier MandelliDidier Mandelli :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la réforme ferroviaire, que nous avons adoptée il y a près d’un an et demi, prévoit une évolution profonde de la gouvernance de la SNCF, qui passera au 1er janvier 2020 du statut de groupe public ferroviaire constitué d’EPIC à celui de groupe public unifié constitué de sociétés anonymes. Cette évolution doit être précisée par ordonnance.

Or cette ordonnance, publiée au mois de juin dernier, n’a pas été ratifiée par le Parlement, et aucun calendrier de ratification ne m’a été communiqué. Monsieur le secrétaire d’État, pourriez-vous nous en dire plus sur le calendrier de ratification envisagé ?

En outre, l’Autorité de régulation des transports a émis de sérieuses réserves sur son contenu, en particulier sur l’indépendance du gestionnaire d’infrastructure, SNCF Réseau. Elle a d’ailleurs réitéré ses craintes dans son récent avis sur les projets de décrets statutaires des sociétés du futur groupe public unifié.

Les projets de loi organique et ordinaire que nous examinons aujourd’hui entendent pourtant tirer les conséquences des dispositions de cette ordonnance.

Au-delà de cette méthode, que je qualifierais de discutable, ces textes conduiraient à affaiblir le contrôle parlementaire sur la nomination des dirigeants de la SNCF, puisqu’ils prévoient de remplacer les trois auditions actuellement prévues par une unique audition du directeur général de la société nationale SNCF maison mère. Or l’évolution de la gouvernance du groupe ne saurait justifier de restreindre ainsi le droit de regard du Parlement sur de telles nominations.

La commission de l’aménagement du territoire et du développement durable s’est saisie pour avis de ce texte et a entendu, avec l’avis favorable de la commission des lois, conforter le contrôle parlementaire sur la nomination des dirigeants de la SNCF, selon trois axes.

Tout d’abord, la commission a veillé à maintenir la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution pour la nomination du dirigeant de SNCF Réseau, qui est prévue depuis 2010 et que le projet de loi organique tendait pourtant à supprimer.

Or avoir choisi de maintenir une structure verticalement intégrée justifie à plus forte raison d’encadrer la nomination du dirigeant de la société SNCF Réseau. Aussi, en raison du rôle central que jouera le gestionnaire d’infrastructure dans l’accès au réseau et a fortiori dans la perspective de l’ouverture à la concurrence, la commission a-t-elle été soucieuse de garantir l’audition de son directeur général par les commissions compétentes du Parlement.

Ensuite, étant donné que la possibilité sera laissée au conseil d’administration de la société mère et de la filiale SNCF Réseau de dissocier la direction générale de la présidence du conseil d’administration et en raison du rôle important que jouera le président du conseil d’administration dans chacune de ces sociétés, notre commission a souhaité les soumettre à la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution.

À ce titre, je rappelle les termes de l’exposé des motifs de la loi organique du 4 août 2014 relative à la nomination des dirigeants de la SNCF, texte déposé par les députés dans le cadre de l’examen du projet de loi portant réforme ferroviaire de 2014. En effet, ils sont toujours d’actualité :

« Il est impératif que les processus de nomination des dirigeants du futur groupe public ferroviaire continuent de se dérouler sous le regard des parlementaires. Nul ne comprendrait ni n’admettrait que la réforme soit l’occasion de soustraire ces personnalités à un contrôle qui constitue une avancée unanimement reconnue de la démocratie. »

Enfin, un amendement au projet de loi ordinaire vise à soumettre la nomination du président du conseil d’administration de la société SNCF Réseau à l’avis conforme de l’ART, alors que l’ordonnance ne réserve cette procédure qu’au directeur général ou, le cas échéant, au président-directeur général. Les choix en matière de gouvernance et les modalités de nomination des dirigeants du groupe contribuent en effet à garantir cette indépendance.

Aussi, dans le contexte de l’ouverture à la concurrence du transport national de voyageurs et alors même que le régulateur et les nouveaux entrants ont exprimé de vives inquiétudes, il est essentiel de veiller à garantir les conditions d’indépendance du gestionnaire d’infrastructure.

En conclusion, les amendements adoptés par la commission des lois, sur proposition de la commission de l’aménagement du territoire et du développement durable, visent à renforcer le contrôle du Parlement et du régulateur sur les nominations des dirigeants du groupe public unifié.

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