Intervention de Stéphane Artano

Réunion du 18 décembre 2019 à 15h00
Engagement dans la vie locale et proximité de l'action publique — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Stéphane ArtanoStéphane Artano :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, j’interviens ce soir au nom du groupe du RDSE et de ma collègue Nathalie Delattre.

Le mandat de nos 600 000 élus municipaux prendra bientôt fin. Pour la moitié de nos maires actuels, ce mandat sera leur dernier. Plus de 50 % d’entre eux ne souhaitent pas se représenter en mars 2020, chiffre symbolique qui montre l’ampleur de la crise démocratique qui fait rage au cœur de nos villes et de nos villages.

Ici, au Sénat, chambre des collectivités territoriales, ce chiffre nous inquiète, mais ne nous étonne guère. Au fil de nos déplacements et de nos rencontres avec des édiles en leur mairie, nous sommes témoins jour après jour de leur difficulté à poursuivre leur engagement local au service de leurs administrés. Si l’écharpe tricolore de l’élu préféré des Français est de plus en plus lourde à porter, c’est aussi notre modèle communal et notre démocratie locale qui sont en difficulté.

Aujourd’hui, nous faisons face à une situation des plus paradoxales : les maires sont, aux yeux de leurs administrés, responsables de tous les maux de leur cité. Or, le plus souvent, ils ne sont même plus compétents pour les soulager. En effet, ces élus du quotidien et de la proximité se sont retrouvés noyés au sein de grands ensembles, freinés par des procédures administratives de plus en plus complexes, dans un cadre financier chaque année plus contraint.

Aussi, monsieur le ministre, l’annonce de votre projet de loi relatif à l’engagement dans la vie locale et à la proximité de l’action publique a-t-il suscité beaucoup d’espoirs. Les objectifs affichés par le Gouvernement étaient ambitieux : redonner des libertés locales à nos élus, lever les freins à l’engagement municipal, renforcer la cohésion de nos territoires et préserver une dynamique démocratique au cœur de nos villages. Or la montagne a accouché d’une souris, si j’ose dire.

Le travail du Sénat a été à la hauteur de ces enjeux, comme l’ont notamment montré les 1 000 amendements déposés sur ce texte lors de son examen par la chambre haute. Les nombreuses heures de débats sur le couple commune-intercommunalité, sur la répartition des compétences entre les différentes collectivités territoriales, sur le statut de l’élu local, sur la parité, sur la formation des élus, sur leur indemnisation et sur leur sécurité ont démontré les priorités incontournables que devait exprimer ce texte.

C’est pourquoi nous regrettons que, malgré les frustrations générées par la loi NOTRe au sein de nos mairies, malgré cet objectif commun de « conforter chaque maire dans son intercommunalité », seules des possibilités d’adaptations ou d’assouplissements, sous contrôle de l’EPCI, aient été finalement retenues. C’est l’occasion de saluer l’excellent travail de nos rapporteurs de la commission des lois, qui s’étaient notamment attaqués au cœur du problème en proposant un transfert de compétences « à la carte ». Le texte du Sénat supprimait également le transfert obligatoire des compétences « eau et assainissement » dans les communautés de communes et les agglomérations, ce que prônait le RDSE. Nous regrettons donc que ces modifications n’aient pas été retenues par l’Assemblée nationale, puis par la commission mixte paritaire.

Si ce texte peut répondre à certaines situations de blocage, concrètes, par un peu de souplesse, il ne peut prétendre à lui seul revaloriser la fonction de maire, faciliter l’exercice de son mandat et susciter de nouvelles vocations pour un engagement local. Le groupe du RDSE a joué le jeu du pragmatisme en formulant différentes propositions sur ce texte, directement issues de remontées de terrain, sans pour autant attendre la présentation du projet loi dit « 3D » – décentralisation, différenciation et déconcentration – et du projet de loi sur la sécurité locale.

C’est par exemple une situation rencontrée par le maire de Salles, en Gironde, qui a motivé la création d’un droit d’information pour les maires lorsqu’une demande d’autorisation de défrichement est déposée auprès de l’autorité compétente de l’État par un des administrés de sa commune. Nous nous réjouissons que cette proposition du RDSE ait été adoptée dans la version du texte issue de la commission mixte paritaire.

C’est aussi l’exemple du médiateur territorial de la ville de Bordeaux qui a inspiré la proposition de loi de Nathalie Delattre, permettant de faire prospérer un mode de règlement de conflit à l’amiable. La médiation territoriale permettra, nous en sommes convaincus, de faciliter ou de réinstaurer le dialogue entre les collectivités et leurs habitants. C’est un outil de proximité, innovant, à l’image des élus locaux et au service du bien vivre ensemble. Au nom de ma collègue et de mon groupe, je tiens à vous remercier, monsieur le ministre, d’avoir encouragé cette proposition de loi.

C’est encore par ses contacts permanents avec les élus locaux qu’Éric Gold a proposé et fait adopter l’ouverture du système d’équivalence universitaire à la valorisation de l’expérience acquise au cours des mandats, pour faciliter la reconversion des élus locaux.

Nous déplorons néanmoins que certaines propositions n’aient pas reçu l’aval du Gouvernement et de l’Assemblée nationale, par exemple la création d’un droit de timbre en matière d’autorisation et de déclaration d’urbanisme.

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