Il s’agit d’un amendement de coordination par anticipation avec un amendement que nous avons déposé à l’article 3, et qui tend à préserver l’anonymat du donneur dans le cadre de la procréation médicalement assistée.
Son objet est clair : souligner les conséquences problématiques de la levée de l’anonymat des donneurs de gamètes. Je précise qu’il n’est question que du nom du donneur, pas d’informations génétiques utiles aux donneurs comme aux enfants nés du don.
Nous en avons beaucoup discuté au sein de mon groupe : les avis restent partagés, mais je fais partie de ceux qui considèrent que le texte actuel n’est pas satisfaisant.
Par peur de décourager les dons, le projet de loi ne contraint pas les donneurs à révéler systématiquement leur identité. Or cette faculté, si elle est confortable pour le donneur, est plus discutable du point de vue des enfants. Elle les placerait dans une situation d’inégalité selon le choix du donneur.
Surtout, l’utilité de cette disposition n’est pas convaincante. On comprend aujourd’hui la nécessité que ressentent les enfants issus de dons de gamètes de connaître leurs origines. C’est une quête tout à fait compréhensible qu’ils partagent avec la plupart de nos concitoyens, si l’on en croit l’engouement pour la généalogie. Cette recherche contribue à la construction de l’identité narrative, comme l’appelait Bourdieu, de tous ceux qui cherchent à donner un sens à leur vie.
S’agissant du don de gamètes, nous craignons que la levée de l’anonymat ne charge de sens familial un acte qui s’en éloigne absolument. En effet, nous considérons que l’essentiel de la filiation se manifeste après la naissance, dans l’éducation, les soins et l’affection apportés, ainsi que dans les valeurs transmises.
Il est possible que plus le mystère de la conception soit grand, plus la quête des origines soit impérieuse.
Enfin, l’argument selon lequel il existe un risque d’union entre frères et sœurs qui s’ignorent ne me convainc guère, dès lors que le recours aux gamètes d’un donneur est limité à la naissance de dix enfants : cette hypothèse ne me semble pas plus probable que l’union entre frères et sœurs issue d’un adultère.