Nous avons connu beaucoup de problèmes dans le Val-de-Marne et dans l'Essonne, c'est vrai. Pourquoi ? Parce que les réorganisations ont été ratées, ce qui arrive aussi ! Dans ce cas, il faut un an pour tout reconstruire, et nous sommes en train de le faire, par de nombreuses réunions avec les préfets et les maires de ces deux départements.
La Poste Mobile est devenue importante pour notre groupe, avec une contribution supérieure à 60 millions d'euros, et 1,8 million de clients, contre zéro en 2011. Je regrette vraiment que nous vous ayons perdue, madame la sénatrice, et je nous fixe comme objectif d'essayer de vous récupérer comme cliente ! Cela nous intéresse toujours de savoir pourquoi les clients nous quittent. Cela dit, nous en avons 200 000 de plus que l'année dernière. En tout cas, c'est une diversification qui fonctionne.
Vous avez évoqué notre présence territoriale. Il est logique qu'il y ait un écart entre la vision stratégique et ce qui se passe sur le terrain. Je ne l'organise pas, bien sûr, mais lorsque vous tracez pour une immense entreprise ses orientations et ses priorités, vous devez vous efforcer de faire en sorte qu'elles soient enthousiasmantes, positives et claires. Mais, dans la réalité, comme il y a 250 000 personnes, 46 000 tournées, 18 000 implantations, la complexité arrive. Je crois donc que nous devons changer notre système, comme nous l'avons fait depuis cinq ans, mais je crois aussi à tout le système d'alerte et de partenariat. Associer les élus, c'est avoir un dispositif d'alerte. Dans nos process postaux, c'est une obligation professionnelle d'avoir averti les élus. Les commissions départementales de présence postale territoriale fonctionnent, avec des élus extrêmement engagés. Il est vrai que le non-cumul des mandats pose une difficulté, puisque nous n'avons plus de parlementaires. Je serais tout à fait prêt, cela dit, à accueillir dans ces commissions un représentant du Sénat et un représentant de l'Assemblée nationale. Tout ce qui nous permet de traiter les sujets avec vous est une bonne chose. Anticiper la saisine des élus est une obligation professionnelle !
Vous m'interrogez sur la mutualisation. Ce qui se passe dans notre pays, c'est la polarisation des activités et la digitalisation. Résultat : les points de contact sont moins fréquentés. Or, ce qui détermine les heures d'ouverture, c'est la fréquentation. Comme il y a 17 000 points de contact, il peut y avoir des dysfonctionnements : merci de nous le signaler ! Mais nous avons des procédures, que nous respectons. Le nouvel accord avec l'AMF prévoit, notamment, des obligations très précises sur les fermetures estivales : si nous fermons un bureau de poste pendant plus de quinze jours, il faut toujours qu'un autre bureau du même bassin de vie reste ouvert.
La transformation a eu lieu, et il y a à peu près une moitié de bureaux de poste et une moitié de points de partenariat. Avec un point de partenariat, on perd la possibilité d'avoir un conseil financier dans l'endroit en question. Mais ce qu'on gagne, c'est l'extension des horaires d'ouverture ! L'accord signé avec l'AMF de François Baroin - et qui le sera avec Mme Gourault la semaine prochaine - prévoit que le retrait et le dépôt de cash pourront passer de 350 à 500 euros. Et nous sommes prêts à utiliser le fonds départemental de présence postale territoriale pour cofinancer des distributeurs de billets non rentables, à condition que leur coût de fonctionnement soit aussi couvert. L'un de vos collègues s'était d'ailleurs engagé sur ce sujet, à travers le dépôt d'une proposition de loi. Nous sommes à vos côtés pour trouver une solution. Les horaires d'ouverture doivent faire l'objet d'un consensus, dans la mesure du possible, mais La Poste reste une entreprise. Clairement, les points de partenariat permettent souvent une extension considérable de ceux-ci, notamment en secteur urbain.
Sur la logistique urbaine, nous avons déjà signé avec 19 des 22 métropoles françaises. Dès le mois d'avril, après les élections municipales, nous allons engager un Tour de France de la logistique urbaine pour dire aux maires ou aux présidents de ces métropoles que nous souhaitons réaliser avec eux, d'ici à 2026, la décarbonation de la totalité de leur transport de marchandises. Certains voudront 100 %, d'autres 50 % : nous nous adapterons. Ensuite, nous diffuserons ces pratiques dans les villes moyennes et petites. Il nous faut commencer là où c'est rentable, pour accumuler des résultats positifs plutôt que des pertes. Mais le but est bien de décarboner la totalité de la logistique. Pour la logistique rurale, il faudra que nous trouvions des solutions. Vous avez été nombreux à souligner que, comme La Poste passe partout, elle pourrait transporter autre chose que les colis. Nous faisons déjà du transport de médicaments sous pli scellé. Ce matin, à l'Assemblée nationale, on nous a proposé de distribuer du pain en zone rurale. Si nous sommes payés pour le faire, nous le ferons !
Quant à notre expansion internationale, le chiffre d'affaires de cette année atteint 10,1 milliards d'euros. Au-delà de l'Europe, nous allons nous développer en Asie du Sud-Est, grâce à une participation minoritaire dans un opérateur qui est actif à Singapour et dans l'Asie du Sud-Est. Nous sommes présents auprès d'une famille indienne, en Inde : nous avons 45 % du capital, et la famille en a 55 %. Nous nous sommes implantés au Brésil, et nous allons rayonner dans l'Amérique latine. Nous commençons aussi à nous implanter progressivement en Afrique, car nous pensons qu'il y a beaucoup de potentiel sur ce continent. En termes de chiffres d'affaires, nous étions à moins de 5 milliards l'année dernière, à plus de 10 l'année dernière, en 2025, nous devrions être très sensiblement au-dessus de ces 10 milliards. Nous sommes déjà, grâce à GeoPost, le premier opérateur de logistique français, et de très loin. Nous tenons demain à Berlin un forum avec tous ses managers.
Vous m'interrogez sur la prise de majorité par la CDC. Il y avait deux actionnaires de La Poste, il y aura les deux mêmes. Comme la CDC est un établissement public sui generis contrôlé par le Parlement, cela reste assez puissamment public. Bref, je ne trouve pas de trace, même homéopathique, d'intérêts privés dans le capital de La Poste à ce stade. Bien sûr, la CDC est plus financière, dans son approche - tout en restant publique - que l'État, qui a des responsabilités politiques et régaliennes. Mais, dans la mesure où l'État reste au capital, où il préside le comité des services publics, où il reste culturellement l'État en France, je ne suis pas inquiet sur les missions de service public, d'autant que la CDC y trouve un intérêt économique, puisqu'elles sont compensées, et non surcompensées, comme le vérifie régulièrement la Commission européenne. De plus, la grande priorité de la CDC d'Éric Lombard est de lutter contre les fractures territoriales. J'attends de mes actionnaires qu'ils contribuent à notre développement, y compris par des augmentations de capital à venir.
Pour l'accessibilité des métiers bancaires, nous utilisons le Livret A gratuit pour tout le monde, et nous avons accru la collecte et le retrait de 350 euros à 500 euros.
Vous avez évoqué le climat social. Nous sommes une très grande entreprise, qui connaît de temps en temps des conflits sociaux, d'autant que nous sommes en pleine transformation. Nous résolvons à chaque fois ces conflits par la négociation. Les postiers participent massivement aux élections professionnelles : 75 % de participants aux dernières élections. Ils sont engagés dans le mouvement que nous impulsons. Nous n'avons pas de grève générale même si les participations aux journées d'action ont été significatives, sans pour autant troubler le service universel postal. En tout cas, nous donnons la priorité au dialogue social, nous passons des accords sociaux et nous associons nos syndicats à la réflexion stratégique sur notre avenir. Ainsi, nous allons lancer le 27 février prochain, dans le cadre de notre journée sur les résultats de La Poste en 2019, une grande démarche participative sur notre plan stratégique « La Poste 2030 ». Nous allons consulter les 220 000 postières et postiers français dans le cadre de l'organisation de plus de 15 000 tables rondes, en leur demandant de se prononcer sur ce que nous allons faire. Vos facteurs vont se réunir pendant une heure et ils vont répondre à des questions. Et si vous m'invitiez à vous présenter le résultat de ces consultations, je viendrais avec plaisir. Nous travaillerons aussi avec l'AMF, l'Association des départements de France et Régions de France. Et nous allons consulter les clients. Nous nous préparons à devenir une entreprise avec une raison d'être, une mission, et un comité des parties prenantes.
Dans les communes nouvelles, pour La Poste, il est compliqué d'avoir cinq places de la République, six rues de La Poste et quinze places du général de Gaulle - sans parler des squares de l'église : pour parler franchement, ce n'est pas de la tarte !
Sur le numérique, nous sommes un acteur public qui garantit la souveraineté nationale. Nous avons un accord de certification numérique pour cinq ans.
Tout ce que nous faisons avec les territoires, nous le faisons dans le cadre des institutions que vous avez vous-même créées, et notamment de l'Observatoire national de la présence postale territoriale, fondée par un sénateur. La commission supérieure du numérique et des postes est également présidée par un sénateur !
Je termine avec le prix du timbre. Nous perdons chaque année 600 millions d'euros de chiffre d'affaires. Le prix du timbre nous compense à peu près la moitié. Sans cette moitié, je ne sais pas comment nous ferions. Tous les pays d'Europe le font, et ils ont commencé bien avant nous ! Les plus malins dans cette affaire ont été les postiers allemands, qui ont procédé au début de leur transformation à des hausses considérables du prix du timbre, ont amassé des profits et les ont utilisés pour la réaliser. Il n'y a pas d'alternative à la hausse du prix du timbre. Tant que nous n'avons pas fait pivoter notre modèle, nous allons poursuivre, avec l'Arcep - car ce n'est pas nous qui le décidons -, la hausse du prix du timbre.