Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, les deux conventions d’extradition et d’entraide judiciaire en matière pénale que nous examinons aujourd’hui semblent aller dans le bon sens.
J’évoquerai tout d’abord l’aide apportée par la France au développement administratif et judiciaire du Burkina Faso. Dans le cadre de cet effort de démocratisation, il faut s’attacher à ne pas effectuer, pour la reproduire, un simple copier-coller de notre administration française.
Ces conventions ont une portée relative, puisque l’on ne parle, en matière d’extradition par exemple, que de six dossiers en cours, dont celui du frère de Blaise Compaoré arrêté à Roissy. Il s’agit d’un feuilleton que nous suivons de très près. En effet, François Compaoré a vu une partie importante de ses mandats d’arrêt burkinabés annulée. En parallèle, la Côte d’Ivoire se montre toujours aussi réticente à l’extrader, d’autant qu’il est devenu depuis citoyen ivoirien. La France, au vu de ses relations privilégiées avec les deux pays, pourrait jouer le rôle d’intermédiaire pour permettre à l’ancien Président Compaoré d’être enfin jugé au Burkina Faso. Le plus dur reste donc à faire pour que toute la justice triomphe et que les coupables soient jugés.
Par ailleurs, depuis novembre 2017, à la suite de la promesse faite par le Président de la République à Ouagadougou, les archives françaises relatives à l’assassinat du Président Thomas Sankara sont déclassifiées pour partie. Il s’agit d’une avancée majeure, dont nous nous félicitons, pour que la justice fasse enfin son œuvre.
Ces deux conventions doivent aider le Burkina Faso à perfectionner son système judiciaire. C’est pourquoi notre groupe les votera, tout en ayant des réserves sur la politique générale de la France en Afrique et, plus particulièrement, au Sahel. À ce titre, l’audition du général à la retraite Didier Castres par notre commission a été très éclairante – en tout cas, en ce qui me concerne – sur la gestion des crises et, surtout, sur la prévention des conflits. Il a porté un certain regard critique sur nos positions.
Quelle est la réponse de Paris au développement des mouvements populaires anti-Français et d’un terrorisme islamiste loin d’être éradiqué, et même plutôt tentaculaire, dans les pays du Sahel comme le Burkina Faso ?
À mon avis, en reprochant à des forces étrangères de manipuler l’opinion burkinabée, Emmanuel Macron a minimisé l’implication des armées sahéliennes dans la lutte contre le terrorisme. En effet, tous ces pays du Sahel ne misent pas forcément sur une armée forte pour leur pays. Certains d’entre eux veulent au contraire que leur armée nationale ait le moins d’influence possible sur le gouvernement. Il faut dire aussi que leurs moyens en matériel militaire sont bien inférieurs aux nôtres.
Je souhaiterais évoquer ici l’opération Barkhane.
Les groupes terroristes, très nombreux, continuent de se renforcer. Les soldats français sont de plus en plus souvent leurs cibles. Les événements tragiques s’enchaînent et la situation empire. Résultat : le ressentiment contre la France et, plus encore, contre la politique française en Afrique grandit, sans oublier que des milices locales de la mouvance islamiste complexifient encore davantage la situation dans cette zone.
Comment justifier l’envoi de nouveaux soldats ? Est-ce donner l’image d’une plus grande implication de la France ? Je ne vois pas ce que changera vraiment la mobilisation de 200 soldats français supplémentaires.
Au-delà de ces deux conventions, que nous soutenons, se pose la question des perspectives. Comment aboutir à la paix dans cette région du Sahel ? Il faut probablement une gestion différente de l’aide au développement, tout le monde est d’accord sur ce point. Mais il faut surtout une solution politique : chacun sait qu’il faudra s’y atteler un jour.