Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, le préambule de notre débat de ce jour est un paradoxe. En effet, la législation fiscale est une question éminemment nationale, alors que les échanges économiques ont raccourci les distances et interconnecté marchés et services.
Pour répondre à ce paradoxe, donc pour organiser cette concurrence de souveraineté, les États ont décidé de régler leurs relations fiscales à travers un réseau de conventions bilatérales. Il en existe 125 entre la France et des pays tiers, plus de 2 500 dans le monde. Ces conventions ont notamment pour objet de régler les cas de double imposition. Nous sommes en présence de deux souverainetés : l’État source des revenus et l’État de la résidence du contribuable. La plupart de ces conventions sont rédigées en prenant pour base le modèle établi par l’OCDE.
À ce titre, la France et le Botswana ont signé, le 15 avril 1999, une convention en vue d’éviter les doubles impositions et de prévenir l’évasion et la fraude fiscales en matière d’impôts sur le revenu. Cette convention est entrée en vigueur le 1er juin 2003 et concerne les revenus perçus à compter de 2004.
Classiquement, elle formalise l’assistance administrative en matière d’échange de renseignements, dans le but de faciliter le recouvrement de l’impôt. C’est l’objet de son article 26, prévoyant que France et Botswana échangent des renseignements utiles pour l’application de la convention et de la législation de nos États en vue de prévenir l’évasion et la fraude. Cette disposition vise les résidents de l’un ou l’autre pays sans que ce critère soit exclusif.
Néanmoins, l’article 26 de la convention en vigueur est en décalage par rapport au modèle OCDE le plus récent. Ainsi, en application de l’article 238-0 A du code général des impôts, le Botswana faisait partie de la liste française des États et territoires non coopératifs. Cette inscription répondait au critère d’absence de convention d’assistance administrative avec la France permettant l’échange de renseignements nécessaires à l’application de la législation fiscale. Le code général des impôts prévoit que, pour que le Botswana puisse sortir de cette liste, la mise en œuvre de la convention doit permettre un échange de renseignements dans les conditions prévues par l’article 26 du modèle OCDE.
Or, depuis 2018, un nouveau modèle de convention multilatérale issu des travaux de l’OCDE de 2015 s’applique par le biais de l’instrument multilatéral qui a modifié la quasi-totalité des conventions fiscales existantes, afin de prévenir l’érosion de la base d’imposition et le transfert de bénéfices.
En conséquence, Paris et Gaborone ont signé en juillet 2017 un avenant à la convention fiscale qui lie nos deux pays. Le présent projet de loi valide cet avenant qui intègre les dispositions du modèle OCDE au sein de la convention franco-botswanaise. Ainsi, la qualification pour les renseignements transmis est élargie aux renseignements « vraisemblablement pertinents ». Autre avancée significative déjà évoquée par le rapporteur, l’ensemble des prélèvements recouvrés par les deux pays sont concernés, et non plus les seuls impôts visés par la convention.
À la suite de la signature de cet avenant, intervenue à la demande de la France en janvier, le Botswana ainsi que d’autres États ont été retirés de la liste des États et territoires non coopératifs.
Je crois que nous pouvons nous féliciter de l’expansion des standards internationaux en matière de transparence et d’échanges de renseignements dans le domaine fiscal.
De la même manière, il faut accueillir avec intérêt les récentes initiatives prises par le Botswana à travers la modification de son réseau de conventions fiscales avec les pays européens ou son adhésion au cadre BEPS (B ase E rosion and P rofit S hifting) de l’OCDE. C’est un premier pas vers l’intégration totale par ce pays des normes fiscales internationales partagées par les économies de la planète.
Cela ne signifie pas pour autant, le rapporteur Vincent Delahaye l’a très bien rappelé, que le Botswana remplisse l’ensemble des critères d’une gouvernance fiscale parfaite : d’une part, ce pays figure sur la liste « grise » de l’Union européenne ; d’autre part, des doutes subsistent sur la mise en œuvre effective de l’échange d’informations.
Cela appelle à mon sens une réflexion sur la place du Parlement et de notre commission dans un suivi plus précis en matière de gouvernance des pays avec lesquels la France s’entend conventionnellement.
En conclusion, chers collègues, nous avions déjà eu l’occasion, lors du vote de l’article de ratification de la convention BEPS, de saluer les avancées, certes toujours insuffisantes, intervenues en matière de coopération fiscale internationale et d’établissement d’un cadre commun. Je réitère ce satisfecit à propos de cet avenant dont le présent projet de loi tend à autoriser l’approbation. Le groupe LaREM votera celui-ci.