Cette mission nous a permis d'aller au fond des choses. Il est important que les élus nationaux se rendent in situ en outre-mer pour se rendre compte des réalités de nos territoires.
Le troisième défi sécuritaire auquel nous nous sommes intéressés est la lutte contre l'immigration irrégulière. La Guyane est le seul territoire de l'Union européenne à disposer d'une frontière terrestre avec l'Amérique du Sud. C'est donc un territoire très attractif pour les candidats à l'immigration. L'afflux constant de populations étrangères, migrantes ou transfrontalières déséquilibre le fonctionnement des services publics.
Les services de l'État sont confrontés dans leur mission de lutte contre l'immigration irrégulière à plusieurs défis spécifiques à la Guyane : un territoire vaste et peu peuplé, sans infrastructure permettant un accès aisé à toutes les parties du territoire, et des frontières poreuses.
Face à cette situation, trois actions spécifiques sont menées en Guyane.
En premier lieu, pour réussir à appréhender les personnes en situation irrégulière, la police aux frontières travaille sur les filières d'immigration et les filières d'exploitation. Les actions menées semblent porter leurs fruits : en 2018, 15 filières d'immigration irrégulière ont été démantelées.
En deuxième lieu, la lutte contre la fraude documentaire en matière d'état civil constitue un volet fondamental de la lutte contre l'immigration irrégulière. La nationalité française d'un enfant, qu'il soit né en France ou non, dépend en effet principalement de la nationalité de ses parents. Une reconnaissance frauduleuse de paternité a des conséquences importantes, notamment quant à l'accès de l'ensemble de la famille aux prestations familiales.
En troisième lieu, la Guyane est exposée à une forte pression en matière de demandes d'asile. La demande d'asile a été multipliée par cinq entre 2014 et 2017. Elle représente 82 % de la demande présentée dans les territoires ultramarins. Cette situation particulière a conduit à la mise en place d'une procédure dérogatoire dans le traitement des demandes d'asile en Guyane afin de réduire leur délai de traitement. Cette expérimentation doit être pérennisée.
À plus long terme, réduire l'immigration irrégulière en Guyane nécessite de réfléchir aux conditions d'acquisition de la nationalité française sur ce territoire. Ce n'est pas un sujet neutre. L'accès à la nationalité constitue en effet, avec la qualité des soins, l'une des principales motivations de mères étrangères venant mettre au monde leur enfant en France. Symboliquement forte, l'adaptation des conditions d'acquisition de la nationalité française par l'introduction d'une condition de régularité du séjour des parents lors de la naissance de l'enfant sur le sol français - sur le modèle de ce qui existe à Mayotte - est une piste de réflexion. Je souhaite insister sur ce point, car la mesure a été mise en place à Mayotte à mon initiative. J'y étais personnellement opposé à l'origine, mais je me suis progressivement rendu compte qu'il s'agissait d'une mesure indispensable pour l'équilibre de mon territoire. Il nous semble que la situation est comparable en Guyane.