Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, avant toute chose, il me semble utile d’apporter modération et apaisement, face à l’emballement médiatique et parfois politique, face aux discussions tous azimuts dont nous avons pu être témoins ces derniers jours. Un sujet aussi grave mérite unité et responsabilité.
Face à un climat anxiogène, je me félicite de la tenue de ce débat sous la forme de questions-réponses. Il permettra de rétablir quelques vérités quant à la situation actuelle. Tout le monde n’a pas eu l’opportunité de regarder l’émission de Michel Cymes, hier soir, réalisée sur ce même modèle et fort intéressante. Cela permet à nos concitoyens de mieux comprendre.
Selon le centre chinois de contrôle des maladies, 80 % des cas d’infection sont considérés comme bénins. Le taux de létalité du nouveau coronavirus est relativement bas : entre 2, 3 et 2, 6 %. Ce virus est donc moins mortel que les épidémies du SRAS en 2002-2003, avec un taux de mortalité autour de 10 %, et de MERS depuis 2012, pour lequel la létalité atteint 36 %. Enfin, l’indice de contagiosité du virus est lui aussi relativement faible, entre 1, 5 et 3, 5. À titre de comparaison, celui de la varicelle est de 8, 5 et celui de la rougeole de 9.
Ce n’est pas parce qu’un virus a un indice de reproduction et une létalité faibles qu’il est inoffensif. La grippe saisonnière est dans ce cas de figure : pour la saison 2018-2019, elle a fait 8 100 morts en France. Le Covid-19, de son côté, a tué à ce jour plus de 3 000 personnes dans le monde, dont quatre dans notre pays.
Les médias ont donc un grand rôle à jouer dans la gestion de cette situation sanitaire. Moins de sensationnalisme et davantage de messages de prévention sont une partie du remède. Ces messages ont été rappelés par le ministre.
Le Gouvernement doit également faire preuve de clarté et d’une grande pédagogie dans l’explication de son plan de gestion du risque. Certaines incohérences, au moins certaines décisions perçues comme telles, dans la mise en œuvre des actions d’endiguement sont pointées du doigt : pourquoi annuler le semi-marathon de Paris et non certains matchs de football ? C’est une question de proportionnalité, je l’entends bien, mais nos concitoyens ne le comprennent pas toujours.
Chaque Français est, enfin, responsable des informations qu’il véhicule. Chacun d’entre nous peut participer, à son insu, à l’installation d’un climat anxiogène contre-productif. L’une des conséquences les plus préjudiciables en serait la saturation des hôpitaux.
Les professionnels de santé – je veux également les saluer – se préparent, dans un contexte particulier pour l’hôpital public. Il y a quelques semaines, plusieurs centaines de chefs de service ont démissionné de leurs fonctions d’encadrement pour dénoncer le manque de lits et d’effectifs.
Différents plans gouvernementaux se sont succédé ces derniers mois, sans jamais emporter la pleine satisfaction des personnels hospitaliers. Aussi, je me félicite que le Gouvernement ait débloqué 260 millions d’euros supplémentaires issus de la mise en réserve prudentielle pour faire face à cette situation. Je regrette néanmoins que l’hôpital public bénéficie d’enveloppes supplémentaires au gré des situations de crise et non de façon pérenne et programmée.
De l’aveu de médecins, certains hôpitaux sont déjà débordés, alors que le nombre de patients hospitalisés est encore faible. L’un des enjeux sera de maintenir un niveau de soins élevé pour les personnes hospitalisées pour d’autres motifs que le coronavirus.
Enfin, face à un système hospitalier en difficulté, il nous faut éviter la contamination du personnel soignant. Le manque de moyens est une chose, le manque de bras en serait une autre.
Le coronavirus soulève des questions à propos d’un autre secteur en souffrance : l’aide à domicile. Face à l’actualisation en continu des instructions ministérielles, ne faudrait-il pas une communication commune, unique à l’échelon national, pour l’aide à domicile avec des déclinaisons locales selon l’intensité de l’épidémie dans chaque département ?
La question se pose également de l’approvisionnement de tous ces professionnels de santé.
Enfin, le coronavirus a une incidence réelle sur l’économie mondiale. L’OCDE a ramené sa prévision de croissance planétaire de 2, 9 à 2, 4 % pour 2020. Celle-ci pourrait même être divisée par deux en cas d’allongement de la durée de l’épidémie. Le risque de récession est désormais envisagé. La France est également touchée : la croissance nationale pourrait passer sous les 1 % cette année.
Pour conclure, le coronavirus met au défi notre société mondialisée. Il révèle les failles de nos systèmes d’organisation. Il conduit à s’interroger sur les fondations de nos systèmes économiques.
S’il est trop tôt pour évaluer l’ampleur de l’épidémie, je veux croire que cette crise sanitaire nous permettra de rendre nos sociétés plus résilientes.