Intervention de Yvon Collin

Réunion du 27 septembre 2010 à 21h30
Nouvelle organisation du marché de l'électricité — Suite de la discussion d'un projet de loi

Photo de Yvon CollinYvon Collin :

Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, monsieur le président de la commission, monsieur le rapporteur, mes chers collègues, l’énergie est probablement l’un des défis majeurs auquel sera confronté l’ensemble des pays lors de la prochaine décennie.

Pourtant, la politique énergétique européenne est encore à construire. Aujourd’hui, elle repose avant tout, comme en beaucoup de matières, sur le recours à la concurrence, afin d’éviter la constitution ou le maintien de monopoles.

En cassant les chaînes intégrées du producteur au consommateur final, cette politique européenne en gestation cherche à construire artificiellement des marchés où les prix pourraient se former librement, sur le modèle du pétrole.

Malheureusement, cela fonctionne rarement. C’est ainsi que plusieurs États fédérés américains ont entrepris un retour sur la libéralisation de leur secteur énergétique, en s’appuyant pour cela sur le modèle français.

Plus proche de nous, en Grande-Bretagne, l’autorité régulatrice a fait, elle aussi, part de son inquiétude quant aux conséquences de la libéralisation sur les investissements de long terme, la sécurité des approvisionnements et l’efficacité énergétique.

En effet, deux ruptures sont venues modifier le cadre de référence de la politique de libéralisation : d’une part, la lutte contre le réchauffement climatique, qui s’est progressivement affirmée comme une priorité politique ; d’autre part, la sécurité des approvisionnements énergétiques européens.

La nécessité d’intégrer ces nouveaux éléments conduit à poser frontalement la question de la cohérence de la politique énergétique européenne, qui fait face à des enjeux mais aussi à des attentes de nature plutôt hétérogène.

Nous savons tous ici que, grâce au développement progressif des secteurs de l’hydroélectrique et de l’industrie électronucléaire, la France dispose de l’électricité la moins chère d’Europe.

L’enjeu du texte sur lequel nous devrons nous prononcer est de savoir si la nouvelle organisation permettra à notre pays de maintenir une électricité bon marché, dans un contexte de concurrence effrénée et d’impératifs écologiques. Cela vous semble possible, monsieur le secrétaire d’État. Nous verrons.

Est-il légitime de remettre en cause l’avantage énergétique français, unique au monde, pour permettre à des opérateurs privés, incapables d’offrir un meilleur prix, d’exister sur le marché français de l’électricité ?

Cette manière d’ouvrir le marché est pour le moins bizarre, puisqu’elle consiste à créer une distorsion de concurrence au détriment de l’entreprise mieux-disante, EDF, et, par conséquent, à notre détriment.

On peut aisément imaginer les conséquences du projet de loi dans sa mouture actuelle : alignement progressif des tarifs réglementés sur les standards européens, 30 à 50 % plus chers, maintenance des réseaux fragilisée, difficulté de financement du parc électronucléaire, etc.

Bref, avec l’abandon d’une certaine idée du service public, nos concitoyens, monsieur le secrétaire d’État, ne risquent-ils pas d’être sacrifiés sur l’autel de l’appât du gain de sociétés bien plus préoccupées par la course aux bénéfices que par l’intérêt général ?

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