Intervention de Philippe Bas

Réunion du 19 mars 2020 à 21h30
Mesures d'urgence pour faire face à l'épidémie de covid-19 — Article 5

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Le Gouvernement a voulu créer, à côté du régime de l’état d’urgence prévu par la loi de 1955, un nouveau régime qui permette de lui attribuer des pouvoirs exorbitants du droit commun, dont celui de restreindre un certain nombre de libertés en vue de combattre une crise sanitaire.

Son intention était bien de faire coexister de manière permanente ce nouveau régime dérogatoire avec d’autres régimes dérogatoires, comme ceux qui résultent de la loi de 1955, de la théorie des circonstances exceptionnelles ou de l’article 16 de la Constitution.

La commission des lois a adopté un dispositif de nature différente. Nous ne voulons pas inscrire dans notre droit un régime exceptionnel qui pourrait être mobilisé dans des circonstances que nous ignorons dans cinq, dix ou vingt ans, parce que tout régime dérogatoire pose des problèmes en termes de respect des libertés publiques. Par conséquent, nous avons voulu circonscrire le recours à l’état d’urgence sanitaire à la crise que nous connaissons.

Nous ne retirons aucun des moyens que le Gouvernement souhaite se voir attribuer par le Parlement, mais nous ne voulons pas que ce système survive à la fin de la crise née de la propagation du coronavirus. Il y a changement de paradigme, si j’ose dire, entre l’approche du Gouvernement, qui souhaite mettre en place un régime permanent mobilisable en toutes circonstances à l’avenir, et celle de la commission des lois du Sénat, qui souhaite circonscrire l’instauration de ce régime à la crise présente.

Nous verrons plus tard, lorsque sera venu le temps de la réflexion et du bilan de la gestion de cette crise, s’il faut créer un nouveau dispositif permanent, mais, pour l’heure, nous ne pensons pas que ce soit indispensable.

Concernant la durée, le projet initial du Gouvernement, lorsqu’il a saisi le Conseil d’État, était un décalque parfait du régime de la loi de 1955 : le Gouvernement ne pouvait prolonger l’état d’urgence sanitaire au-delà de douze jours sans un vote du Parlement. Le Conseil d’État ayant considéré que douze jours n’étaient pas suffisants pour faire face à une épidémie, la durée d’un mois a finalement été retenue dans le projet de loi.

Nos collègues du groupe CRCE considèrent qu’un mois est une durée trop longue, sans doute parce qu’ils en sont restés à l’idée d’un système permanent dérogatoire – un régime que nous ne voulons pas mettre en place. Ils préféreraient donc que le Parlement se prononce plus tôt. Mais si le Parlement se prononce aujourd’hui, on ne va pas lui demander de le faire de nouveau dans douze jours !

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