Quelques principes doivent nous guider au moment de débattre de ce système – ou d’autres, puisqu’il est aussi question de l’application StopCovid.
Une position quelque peu fallacieuse serait d’opposer les tenants de la liberté individuelle et de la protection des citoyens aux serviteurs de l’intérêt général qui permettraient beaucoup de choses au nom de même intérêt. Ce débat fondamental sur l’équilibre à trouver entre libertés publiques et rôle de l’État a très longtemps traversé l’histoire de la République. Je souhaite aussi que nous puissions discuter de ce sujet, mais à un autre moment et en lui consacrant le temps nécessaire.
Aujourd’hui, la question n’est pas de savoir si l’État peut mettre en œuvre ces systèmes d’information : il s’agit d’un devoir impérieux à l’égard de nos concitoyens. Le raisonnement pourrait même se retourner contre l’État, des citoyens venant lui reprocher de ne pas avoir fait davantage, de ne pas avoir utilisé toutes les ressources à sa disposition, notamment les systèmes d’information, pour enrayer la propagation de l’épidémie.
Les géants du numérique sont absents de cette vieille opposition entre citoyens et État. Au nom du refus de s’immiscer dans les libertés individuelles, nous risquons de leur laisser le champ libre. Ils représentent plus de 160 milliards de dollars de bénéfices et investissent 70 milliards de dollars dans la recherche et le développement.
En renonçant à notre souveraineté, nous courons le danger de laisser les géants du numérique s’emparer de la souveraineté sur notre bien le plus précieux : le lien social. À nous d’engager la construction d’un État plateforme pour disposer d’un système encadré et régulé plutôt que de laisser le champ libre à d’autres acteurs.
Je n’ai pas le temps de développer davantage cette question dans toute son ampleur. Ne nous laissons pas enfermer dans une fausse opposition un peu simpliste qui permettrait à des gens beaucoup plus dangereux de s’emparer pleinement de ce sujet.