Intervention de Alain Richard

Réunion du 9 mai 2020 à 15h30
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, nous avons donc pu nous mettre d’accord sur une série de dispositions législatives qui nous plaçaient devant de très hautes responsabilités.

Ce travail législatif s’est assorti d’une très forte volonté de perfectionner la loi et de tenir compte de l’ensemble des impératifs d’intérêt général. Et je souhaite souligner la part extrêmement importante et positive qu’a prise Philippe Bas, en sa qualité de rapporteur du Sénat, dans le bon aboutissement de ce travail.

Nous pouvions vois, dès l’entrée dans l’hémicycle, que nous avions tout pour aboutir, puisque n’était annoncé aucun projet d’amendement du Gouvernement. La commission mixte paritaire est le seul moment du processus législatif, dans le système constitutionnel français, où le Gouvernement n’a pas à participer. Lorsque ce moment trouve son terme, le Gouvernement est amené, en quelques minutes, à prendre une décision : l’ensemble cohérent auquel la CMP est parvenue lui convient-il – auquel cas il n’y touche pas –, ou bien demande-t-il une retouche ?

Nous pouvons donc considérer que nous avons bien travaillé, dans un esprit de conciliation et de responsabilité qui remplit l’ensemble des cases de nos devoirs.

Je voudrais revenir un instant sur notre débat relatif à l’article 1er, et notamment à son III, qui précise les conditions dans lesquelles s’exercera le cas échéant la responsabilité pénale de toutes les personnes physiques – nous y mentionnons les autorités locales, en premier nos amis les maires, mais aussi les autorités départementales et régionales, ainsi que les employeurs.

Ce texte maintient les principes essentiels du code pénal et prévoit que, dans un état de crise reconnu par la loi, le juge exerce son appréciation en tenant compte de cette situation de crise.

Deux questions vont se poser dans les jours qui viennent devant le juge constitutionnel.

La première : ce texte présente-t-il un lien direct ou indirect avec l’objet du projet de loi qui nous a été présenté ? Cette question est toujours étudiée avec une grande vigilance par le juge constitutionnel. Je voudrais plaider que le lien est bien direct, puisque l’objet de la loi est de maintenir l’état d’urgence sanitaire, lequel place l’ensemble des détenteurs d’un pouvoir de décision face à une situation dans laquelle les conditions d’exercice de leurs missions sont dégradées et l’ampleur de leurs responsabilités aggravée. Ce point me paraît donc en lien direct avec l’objet du projet de loi qui nous a été présenté.

Deuxième sujet sur lequel se penchera forcément le juge constitutionnel : portons-nous atteinte à la séparation des pouvoirs en expliquant au juge comment il doit juger ? C’est un sujet d’appréciation difficile, sur lequel nous avons souvent l’occasion de débattre. Il me semble que, en prévoyant que le juge doit apprécier la situation en fonction de l’état de crise reconnu par la loi, mais – et c’est là l’apport exact du président Bas – en plaçant les conditions d’exercice de ce pouvoir d’appréciation dans le cadre du code de la santé publique – autrement dit, ces conditions ne sont déclenchées que chaque fois qu’est actionné l’état d’urgence sanitaire, qui est un état d’exception défini par la loi – et en respectant les principes du code pénal, nous obéissons bien à l’impératif de laisser le législateur là où il doit être et le juge là où il doit exercer son office.

Je terminerai, monsieur le président, en soulignant le bon travail qui a été fait sur les deux sujets qui posaient des problèmes de compatibilité entre l’urgence de santé publique et les libertés, à savoir, d’une part, le confinement et la quarantaine, et, d’autre part, le système d’information. Je crois que nous avons, les uns et les autres, été scrupuleux ; nous avons fixé les justes bornes là où elles devaient être pour permettre l’action de la santé publique sans entraver les libertés individuelles plus que nécessaire. Il me semble donc que nous pouvons, avec la conscience tranquille, donner notre approbation à ce projet ainsi modifié et complété. C’est ce que fera la totalité des membres du groupe que je représente.

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