Dans le cadre de notre mission de suivi de l'état d'urgence sanitaire, nous accueillons Mme Jacqueline Gourault, ministre de la cohésion des territoires et des relations avec les collectivités territoriales.
La crise actuelle a remis en pleine lumière l'urgence de franchir un nouveau palier dans la décentralisation. Le sentiment s'est répandu que les collectivités territoriales agissaient plus vite que l'État : elles furent les premières à mettre des masques à la disposition du public ; ce sont les départements qui ont permis l'augmentation du nombre de tests, avec le recours aux laboratoires départementaux d'analyses biologiques et vétérinaires ; le rôle des maires ou des présidents d'intercommunalités est absolument déterminant pour la réouverture des écoles. Et à chaque fois, rapidité de décision, souplesse d'exécution, force de l'engagement... Comme si, dans notre pays, l'État était ankylosé, ce qui affecte sa capacité de réaction en gestion de crise. Je ne formule pas là une critique à l'encontre du Gouvernement, mais une interrogation sur la nécessité de donner plus d'agilité à notre organisation territoriale. Que pensez-vous de cette urgence d'une nouvelle étape de la décentralisation ?
Hier, la commission des finances du Sénat vous a interrogée sur les ressources, question importante si nous voulons que nos collectivités locales rendent les services attendus par la population. Je regrette que jusqu'à présent, le Gouvernement n'ait pas décidé d'instituer un moratoire sur la suppression de la taxe d'habitation. Les recettes des départements, notamment les droits de mutation immobilière, ont chuté, tandis que leurs ressources de substitution, dont une part de TVA, sont également procycliques et devraient diminuer. Au contraire, leurs dépenses augmentent radicalement à cause de l'explosion du chômage de longue durée, qui se traduit par une hausse des dépenses d'insertion. Comment prévoyez-vous de compenser la hausse des dépenses des départements consacrées au revenu de solidarité active (RSA) ? Vous savez que leur budget doit être voté en équilibre. Or ils n'ont plus les moyens d'augmenter les impôts puisqu'ils n'auront quasiment plus de pouvoir de taux l'année prochaine.
Le processus électoral entamé le 15 mars dernier, avec le premier tour des élections municipales, a dû être doublement interrompu : d'une part, dans les communes dont le conseil municipal a été intégralement renouvelé, il n'a pas pu être procédé à l'élection du maire et de ses adjoints, ni à l'installation des conseils communautaires ; d'autre part, le second tour n'a pas pu avoir lieu dans près de 5 000 communes.
Quelles sont les réflexions en cours ? Le Premier ministre a annoncé hier l'élection en mai des maires et des adjoints là où le premier tour des élections municipales a été conclusif. Pour le second tour, nous attendrons le rapport du conseil de scientifiques - qui doit être rendu avant le 23 mai - et nous apprécierons ensemble ce qu'il convient de faire. Cela ne nous empêche pas d'évoquer des hypothèses de travail et d'en discuter.
Votre audition est très attendue par nos collègues, et nous vous remercions de nous consacrer ce temps.