Monsieur le président, monsieur le ministre, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, la motion de nos collègues du groupe socialiste et républicain ne manque pas, je dois le dire, de fondement et d’arguments en sa faveur.
Elle résonne dans notre hémicycle, me semble-t-il, comme un coup de semonce. Si l’on ne peut pas dire que ce projet de loi soit, au travers de l’interprétation très extensive qu’il fait de l’article 38 de la Constitution, contraire à celle-ci, on doit tout de même admettre qu’il y a une distance considérable entre la pratique des habilitations législatives qui s’est instaurée depuis quelques années et le sens que les constituants ont entendu donner à cette faculté dérogatoire.
Rappelons-nous l’article 38 : on y souligne, dès les premiers mots, que c’est « pour l’exécution de son programme » que le Gouvernement peut demander au Parlement de l’habiliter à prendre, par ordonnances, des mesures législatives. Le mot « programme » n’est pas dénué de portée dans la Constitution, car on le retrouve dans l’une des dispositions les plus importantes de notre loi fondamentale : celle de l’article 49. Le programme, ce sont les engagements sur lesquels le Gouvernement engage sa responsabilité devant le Parlement.
Or nous voilà saisis de multiples dispositions législatives qui sont, à l’évidence, à la périphérie du programme du Gouvernement et qui ne justifieraient bien évidemment pas que celui-ci engageât sa responsabilité ; on se dirait qu’il a des choses tout de même plus importantes à réaliser que la mise en œuvre de ces habilitations législatives. En outre, le Gouvernement lui-même présente nombre de ces mesures comme des dispositions d’ordre technique.
C’est la raison pour laquelle j’ai, pour ce qui me concerne, longuement hésité avant de prendre la parole pour m’opposer à votre motion, mes chers collègues. En effet, tout aurait dû m’orienter vers cette solution.
Néanmoins, dans un instant de raison, je me suis dit que, si nous adoptions votre motion, alors le Gouvernement, dans un dialogue singulier avec l’Assemblée nationale – dialogue qui ressemble parfois à une sorte de monologue à plusieurs voix, si l’on peut s’exprimer ainsi