Madame la présidente, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, au nom de mon groupe, je veux également rendre hommage aux soignants qui prennent en charge des patients du Covid-19.
La proposition de loi du député Cyrille Isaac-Sibille vise à créer des points d’accueil pour soins immédiats sur l’ensemble du territoire, avec pour objectifs d’améliorer l’accès aux soins et de désengorger les urgences. Je souhaite saluer son travail ainsi que celui de notre rapporteure, Mme Élisabeth Doineau.
Le développement de ces pôles est une mesure de bon sens. Nos services d’urgence prennent en charge une part significative de soins non programmés n’entrant pas du tout dans le champ de leurs missions. Le nombre de passages aux services d’urgence est passé de 10 à 20 millions en vingt ans. La médecine de ville, en raison de la désertification, de la surcharge de travail, mais aussi de l’habitude de fonctionner sur rendez-vous, ne répond plus suffisamment à la demande de soins non programmés. Or près de 20 % des patients ressortent des urgences avec une simple ordonnance, sans examen complémentaire.
Il est écrit dans l’exposé des motifs du texte que la médecine de ville n’est pas en mesure de répondre rapidement, car elle ne dispose pas de matériel de biologie, de suture, de stérilisation, de plâtre. Au contraire, tous les cabinets sont équipés, depuis vingt ou trente ans, de kits de suture et de spéculums stériles à usage unique. En outre, il est fréquemment possible d’obtenir le résultat d’un examen biologique dans les deux heures, même si le laboratoire le plus proche est distant de vingt ou trente kilomètres.
La présente proposition de loi vise à mettre en place une solution avec des points d’accueil pour soins immédiats (PASI) sur tout le territoire, les patients y étant orientés par le centre 15, lequel aura, par son interrogatoire, éliminé la possibilité d’une urgence, par les pharmacies, qui jouent un rôle très important en milieu rural, par des personnels paramédicaux, voire par un secrétariat médical.
Le PASI n’est pas un service d’urgence bis. D’ailleurs, j’aurais, pour ma part, plutôt opté pour l’appellation « point d’accueil pour soins non programmés », car le terme « immédiat » peut évoquer, d’emblée, une urgence, laquelle est traitée par le SAMU et le service d’urgence. Le PASI a été envisagé, dans un premier temps, au sein des établissements de santé, mais les communautés professionnelles territoriales de santé (CPTS) prévues ne disposent pas forcément d’établissements de santé sur leur territoire – ces derniers sont parfois distants de trente à cinquante kilomètres. Pourtant, monsieur le secrétaire d’État, les CPTS ont pour missions de faciliter l’accès aux soins des patients et d’améliorer la prise en charge de soins non programmés. Je pense du reste qu’il est essentiel, comme le texte le prévoit, que le tiers payant soit appliqué très simplement, avec une augmentation du tarif de la consultation du praticien volontaire, sur la base d’une cotation spéciale.
Je veux montrer très concrètement que cela se fait déjà en milieu rural. Je me permets, en toute modestie, de citer mon expérience de vendredi et de samedi. Remplaçant le praticien qui va enfin me succéder, j’ai vu arriver des malades pour des soins non programmés à la maison de santé de ma commune. Il s’agit d’un cabinet de deux médecins, gérant un peu plus de 2 000 dossiers de patients et situé à cinquante kilomètres d’un établissement de santé regroupant dix professionnels. J’ai reçu huit malades hors de tout rendez-vous : pour une fièvre du nourrisson avec diarrhées, une cystite, un traumatisme du pied, une lombalgie aiguë, une colique néphrétique, une brûlure locale du deuxième degré, une fièvre, chez une personne placée en Ehpad, et une rhinopharyngite avec fièvre, chez un adulte que j’ai adressé au laboratoire, pour un test au Covid-19. Je n’ai pas pratiqué de points de suture, bien que ce soit très fréquent. Je n’ai vu ni otites, maladie que l’on rencontre surtout en hiver, ni problèmes cardiaques, ni piqûres de tiques – elles sont aussi très fréquentes –, ni allergies bénignes. Si un élément de gravité avait été constaté lors de l’examen, ces patients auraient été adressés à un service des urgences du CHR ou du CHU, après l’avis du médecin régulateur.
Ce petit résumé bien modeste montre concrètement qu’il est nécessaire d’encourager les points d’accueil pour soins non programmés ou immédiats en milieu rural, ne serait-ce que dans le cadre des maisons de santé, à tour de rôle, dans le territoire de la CPTS, bien évidemment avec l’accord des praticiens, afin de ne pas encombrer les urgences. Fluidifier l’organisation des soins non programmés, c’est exactement l’objet du pilier n° 4 du Ségur de la santé, monsieur le secrétaire d’État.
En conclusion, je souscris à l’objet de cette proposition de loi, qui vise à la mise en place de points d’accueil pour soins non programmés ou immédiats dans tous les territoires. C’est très bien de recourir aux établissements de santé, mais il faut aussi encourager les initiatives en ce sens en milieu rural – il ne faudrait pas qu’elles soient freinées par la création des PASI. Comme l’a dit Mme la rapporteure, l’ARS, chargée de la validation des PASI, devra y procéder avec souplesse et pragmatisme, notamment en milieu rural.
J’espère que mes propositions seront entendues. En attendant, le groupe Les Indépendants – République et Territoires votera évidemment ce texte à l’unanimité.