Intervention de André Reichardt

Réunion du 4 juin 2020 à 14h30
Encadrement du démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux — Adoption en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de André ReichardtAndré Reichardt :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, nous examinons aujourd’hui en deuxième lecture la proposition de loi visant à encadrer le démarchage téléphonique et à lutter contre les appels frauduleux, déposée par notre collègue député Christophe Naegelen – il en est d’ailleurs aussi le rapporteur –, après son adoption par l’Assemblée nationale le 30 janvier dernier.

Composée initialement de six articles, la proposition de loi en comptait onze lors de sa transmission au Sénat et quatorze lors de son adoption en première lecture le 21 février 2019 – cela remonte à loin ! À cette occasion, le Sénat avait adopté quatre articles conformes et trois articles additionnels, tandis que, en deuxième lecture, l’Assemblée nationale n’a adopté que deux articles conformes. Ainsi, sur les quatorze articles de la proposition de loi, neuf sont encore en discussion.

Nous avons bien sûr eu des échanges constructifs avec mon collègue Christophe Naegelen, dans l’objectif de concilier protection du consommateur et développement de l’activité économique. Nous souhaitons parvenir à un bon équilibre à cet égard. Selon moi, nous n’en sommes pas si loin, si le Sénat, dans sa sagesse, ne démolit pas ce à quoi nous sommes parvenus.

Pour cette deuxième lecture, nous sommes, vous l’avez compris, dans un état d’esprit constructif. La commission a adopté deux articles conformes : l’article 2, qui introduit, sur l’initiative du Sénat, le principe de l’open data des données essentielles de l’organisme gestionnaire de la liste d’opposition au démarchage téléphonique, complété par l’Assemblée nationale d’une obligation de publication d’un rapport public annuel par le gestionnaire, à laquelle nous sommes favorables.

L’article 5 a également été adopté conforme par la commission. Il redéfinit le champ de l’exception contractuelle permettant à un professionnel de contacter un consommateur inscrit sur Bloctel, en la restreignant aux sollicitations en rapport avec l’objet d’un contrat en cours, qui peuvent également porter sur des produits complémentaires – c’est une nouveauté. Cette nouvelle rédaction présente l’avantage d’être plus protectrice des consommateurs que le droit actuel, sans être aussi rigoureuse que le texte initialement retenu par l’Assemblée nationale en première lecture et auquel le Sénat s’était opposé.

Nous aurons tout à l’heure une discussion sur l’exception contractuelle, car plusieurs amendements portent sur ce sujet. Je forme le vœu qu’elle ne suscite pas trop de débats, dans la mesure où nous sommes limités par le temps. Il serait dommage que l’adoption de cette proposition de loi soit une nouvelle fois repoussée.

Toujours dans le même état d’esprit constructif, la commission n’est pas revenue sur la suppression de deux articles par l’Assemblée nationale, à savoir l’article 1er A concernant les modalités d’inscription à Bloctel par téléphone – il était en réalité déjà satisfait par les textes, cher monsieur Sueur – et l’article 3 bis relatif aux règles de plafonnement des sanctions. Nous avons considéré que l’autorité administrative devra toujours exercer son pouvoir de sanction de manière proportionnée, sous le contrôle du juge.

Toutefois, la commission n’a pas adopté l’ensemble du texte conforme, en raison de trois dispositions contestables introduites par l’Assemblée nationale en deuxième lecture.

Tout d’abord, nos collègues députés ont interdit, à l’article 1er bis, le démarchage téléphonique aux professionnels qui vendent des équipements ou des travaux destinés à des logements et permettant la réalisation d’économies d’énergie ou la production d’énergie renouvelable. Je vous proposerai de supprimer cette disposition – des amendements nous demanderont de la réintroduire –, car elle soulève un risque d’inconstitutionnalité important à mes yeux, au regard des principes d’égalité devant la loi et de la liberté d’entreprendre. Si ces amendements étaient adoptés, il appartiendra au Conseil constitutionnel de se prononcer.

Ensuite, l’Assemblée nationale a adopté, à l’article 6, des dispositions nouvelles, que la commission a supprimées au titre de la règle dite de l’entonnoir. Elles visaient à imposer aux opérateurs de filtrer les appels internationaux qui utilisent un numéro national et de mettre en œuvre un mécanisme d’authentification des appels. En effet, sur le fond, la première de ces dispositions est en partie satisfaite. Quant à la seconde, elle me paraît prématurée.

Par ailleurs, l’Assemblée nationale a précisé, à l’article 7, que, parmi les mesures que peut demander la DGCCRF au juge judiciaire en référé ou sur requête, figure la suspension de l’attribution de nouveaux numéros aux exploitants de numéros surtaxés pendant cinq ans au maximum. Une telle durée a semblé excessive à la commission, qui l’a donc ramenée à six mois.

Enfin, la commission a apporté d’autres modifications moins substantielles à l’article 1er bis visant à clarifier le caractère réfragable de la présomption de responsabilité du professionnel qui méconnaîtrait ses obligations en matière de démarchage téléphonique et à préciser le texte sur les obligations déontologiques auxquelles les professionnels seraient désormais soumis.

Dans la discussion que nous allons avoir, de nombreux amendements reviennent sur le sujet dit de l’opt - in. Le Parlement a fait le choix de maintenir l’opt - out.

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