Intervention de Jean-François Longeot

Réunion du 4 juin 2020 à 14h30
Encadrement du démarchage téléphonique et lutte contre les appels frauduleux — Adoption en deuxième lecture d'une proposition de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Jean-François LongeotJean-François Longeot :

Madame la présidente, madame la secrétaire d’État, mes chers collègues, une fois encore, nous examinons cette proposition de loi dont l’examen a pourtant débuté en 2018.

Une fois encore, nous nous rendons compte de l’impérative nécessité de mieux protéger nos concitoyens, alors que la récente période de confinement a livré une nouvelle illustration de la galère que représente le démarchage téléphonique abusif, avec une recrudescence constatée des appels, notamment frauduleux.

Deux ans après le début de l’examen de ce texte, donc, le constat et l’urgence restent d’actualité, car ce sont neuf Français sur dix qui déclarent être excédés par le démarchage téléphonique, neuf Français sur dix qui jugent ces appels agaçants, et neuf Français sur dix qui les trouvent trop fréquents.

Si l’on dit la France divisée, voire « archipélisée », force est de constater l’unanimité du réquisitoire contre le démarchage téléphonique.

D’ailleurs, la pétition réclamant la fin pure et simple du démarchage téléphonique lancée en janvier dernier a déjà recueilli plus de 115 000 signatures. Mais nous savons bien que cette solution est trop radicale. Nous devons donc avancer tant bien que mal, et faire évoluer le cadre législatif, car, une fois encore, un compromis est nécessaire pour atteindre l’équilibre le plus optimal entre l’impératif de protéger les citoyens et la nécessité de ne pas entraver l’activité économique.

Nous devons trouver un compromis, disais-je ; c’est bien parce que le compromis précédent n’en était pas un que nous en sommes réduits à devoir légiférer à nouveau sur le sujet.

Si, depuis 2014, Bloctel permet aux citoyens de faire valoir leur opposition expresse à de tels démarchages, les résultats sont modestes, l’inefficacité patente, le mécontentement grandissant. Il y avait des trous dans la raquette de ce dispositif législatif ; ainsi, il n’intégrait pas les pratiques frauduleuses qui n’entrent pas dans le champ du démarchage téléphonique.

Si je suis, à titre personnel, favorable à un opt-in tranché – je considère que le démarchage téléphonique ne devrait pouvoir se faire qu’une fois recueilli le consentement préalable du citoyen –, notre groupe partage la position du Sénat et de nos collègues députés, consistant à ne pas remettre en cause la philosophie du droit en vigueur afin de ne pas mettre en péril les plus de 56 000 emplois en jeu.

Je crois, pour ma part, que le contexte actuel n’est pas du tout favorable à une telle remise en cause, mais nos concitoyens ne comprendraient pas que toutes ces discussions, longues de deux ans déjà, accouchent d’une souris, et que cette proposition de loi ne soit pas l’occasion de véritables avancées de leurs droits. Aussi notre groupe partage-t-il la conviction qu’il est impératif de légiférer afin d’apporter de nouvelles réponses contre le démarchage abusif, notamment de protéger les 3 millions de personnes qui ont fait la démarche de s’inscrire sur Bloctel et demandent, de façon parfaitement légitime, une vraie protection. Une telle protection est également bienvenue pour les personnes les plus fragiles, les plus âgées, les moins armées pour résister au démarchage commercial agressif.

Nous nous félicitons des mesures visant à renforcer l’efficacité de l’opt-in et sommes d’accord avec le texte issu des travaux de la commission des lois, dont nous saluons l’effort de consensus et le travail, une fois encore de grande qualité. Nous soutenons ainsi le renforcement des sanctions en cas de manquement des professionnels du secteur, estimant que la nouvelle rédaction de l’exception contractuelle relève de cette ligne de crête qu’il convient de tenir et satisfait au pragmatisme que nous souhaitons voir prospérer dans les débats.

Nous accueillons également avec bienveillance les précisions relatives aux obligations déontologiques, qui se trouveront ainsi gravées dans le marbre de la loi. Reconnaissons que c’est là le moindre des minimums si nous voulons des horaires de démarchage acceptables et plus convenables, de jour davantage que de nuit, et n’empiétant pas sur la vie privée.

Notre groupe souhaite toutefois rétablir certaines modifications de fond introduites par l’Assemblée nationale, afin d’apporter des protections nouvelles et concrètes à nos concitoyens. Il en va ainsi, notamment, de l’interdiction totale du démarchage dans le domaine des économies d’énergie, qui fait l’objet d’un amendement de notre groupe. Si nous entendons l’argument du risque d’entrave à la liberté d’entreprendre, force est en effet de constater les trop nombreux abus dans ce domaine.

De même, nous aurions souhaité rétablir le dispositif de lutte contre le spoofing, qui imposerait aux opérateurs de filtrer les appels internationaux utilisant frauduleusement un numéro national. Nous avions déposé un amendement en ce sens ; il a malheureusement été déclaré irrecevable, mais nous conservons l’espoir qu’un compromis puisse être trouvé en CMP.

Le groupe Union Centriste soutiendra le texte tel qu’issu des travaux de la commission des lois. À titre personnel, j’ai déposé, avec Anne-Catherine Loisier, un certain nombre d’amendements ; nous tiendrons compte des avis qui seront émis sur ces amendements pour nous prononcer sur ce texte. Nous espérons, madame la secrétaire d’État, que le Gouvernement convoquera rapidement une commission mixte paritaire, afin que la loi puisse être promulguée dans un délai raisonnable.

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