Intervention de Alain Richard

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 10 juin 2020 à 9h50
Projet de loi organique portant report des élections sénatoriales et des élections législatives partielles — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Alain RichardAlain Richard :

Faire voter à nouveau le même collège de grands électeurs ne pose pas, me semble-t-il, de problème constitutionnel. Selon le Conseil constitutionnel, il ne faut pas que la majorité du collège qui élit le Sénat soit composé d'élus dont le mandat est prolongé. Le Conseil constitutionnel n'a pas prévu l'option d'appliquer cette solution uniquement au collège qui élit les six sénateurs représentant les Français de l'étranger.

Par ailleurs, c'est le seul collège sénatorial qui vote dans les deux séries - sur les douze sénateurs représentant les Français établis hors de France, six sont élus dans la première série et six dans la seconde série - et il n'y a pas de changement du corps électoral entre les deux séries, sauf intervention de la loi. On pourrait s'opposer si un collège sénatorial n'avait aucune possibilité d'élire des sénateurs.

La solution qui nous est proposée par le Gouvernement est une possibilité, avec l'inconvénient que j'ai mentionné. Le Conseil constitutionnel la validera ou non.

Elle introduit toutefois une nouvelle distinction : lorsque les élections sénatoriales auront lieu le 27 septembre 2020 pour 172 sénateurs sur 178, le renouvellement sera censé être complet, et ce aux termes du dernier alinéa de l'amendement du Gouvernement. L'installation des instances du Sénat pour trois ans aura lieu sans la présence des 6 collègues représentant les Français de l'étranger, qui seront élus plus tard. Cette question nouvelle va demander une interprétation constitutionnelle, qui, de mon point de vue, n'est pas totalement certaine. Même si nous demandions avis au Conseil d'État, in fine, s'agissant d'une question radicalement nouvelle, il reviendra au Conseil constitutionnel et à lui seul de se prononcer. Le Conseil d'État, placé dans cette situation, est toujours assez mal à l'aise : il ne peut pas dire par avance ce que décidera le Conseil constitutionnel. Pour avoir assisté à deux ou trois reprises à la situation inverse, le Conseil d'État, qui avait donné la quasi-assurance de constitutionnalité d'une disposition, s'est trouvé démenti par la décision ultérieure du Conseil constitutionnel, ce qui est peu satisfaisant pour l'équilibre des institutions. Je mets donc en garde contre les effets qu'entraînerait l'adoption de cette solution proposée par le Gouvernement.

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