Intervention de Philippe Bas

Réunion du 9 juin 2020 à 14h30
Protection des victimes de violences conjugales — Articles additionnels après l'article 2

Photo de Philippe BasPhilippe Bas :

Ce débat éveille en moi nombre de souvenirs : comme ministre et comme président de conseil départemental, j’ai été, par le passé, chargé de la protection de l’enfance.

Mon premier mouvement – je suis sûr que c’est aussi le vôtre, mes chers collègues –, c’est d’estimer qu’il ne faut certainement pas laisser l’enfant au domicile du père violent. C’est aussi le sentiment qu’éprouveront la plupart des juges aux affaires familiales.

Toutefois, je suis sensible à ce que vient de dire notre collègue Muriel Jourda, qui, d’une manière différente, a elle aussi l’expérience de ces questions. Parfois – dans 1 %, 2 %, peut-être 3 % des cas –, le juge préfère ne pas retirer au père l’exercice de l’autorité parentale, ou même la suspendre, compte tenu d’une situation familiale particulière, par exemple si la mère est gravement malade ou hospitalisée.

Ces cas de figure existent. Ce ne sont certainement pas les plus fréquents ; il s’agit même de situations exceptionnelles. Mais faut-il que la rigueur de la loi, en créant un automatisme, empêche le juge aux affaires familiales de prendre la mesure qui, dans ces cas, et uniquement dans ceux-là, sera la plus opportune ?

Aussi, je suis à la fois d’accord pour dire qu’il ne faut pas laisser l’enfant au domicile du père violent et d’accord pour dire qu’il faut laisser une marge d’appréciation au juge : un système dans lequel le juge est un automate ne permet pas de prendre en compte les difficultés psychologiques et sociales qui peuvent survenir. Or notre société produit, malheureusement, bien des situations exigeant l’appréciation du juge et des services sociaux.

Mes chers collègues, ne laissons pas l’enfant au domicile du père qui a commis, ou qui est seulement soupçonné d’avoir commis des violences. Mais n’imposons pas au juge des solutions qui seraient préjudiciables à l’enfant dans certains cas exceptionnels !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion