Monsieur le président, monsieur le président de la commission des affaires sociales, madame la rapporteure, mesdames, messieurs les sénateurs, nous sommes réunis cet après-midi pour examiner la proposition de loi du député Christophe Blanchet, adoptée par l’Assemblée nationale le 2 juin dernier, puis précisée dans ses modalités opérationnelles la semaine dernière, en commission des affaires sociales du Sénat, par Mme la rapporteure Frédérique Puissat, que je salue.
Cette initiative parlementaire a une finalité précise : permettre à nos concitoyens qui le souhaitent d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de Covid-19. Aussi ce véhicule législatif a-t-il pour fonction de lever les obstacles juridiques qui se dressent devant cette possibilité. Je le dis dès à présent, car je ne doute pas que nous aurons ce débat : cette proposition de loi n’a nullement vocation à se substituer aux politiques publiques qui doivent répondre dans la durée aux difficultés structurelles du secteur de la santé, du secteur médico-social ou, le cas échéant, de celui du tourisme.
S’agissant du premier, outre le chantier engagé avant la crise sanitaire avec la réforme Ma santé 2022, des annonces significatives ont été faites ces dernières semaines par le ministre de la santé et des solidarités, Olivier Véran. Je pense notamment au versement de primes pour les personnels soignants, aux mesures financières pour l’hôpital, ainsi qu’à une meilleure prise en charge de la dépendance.
En outre, le Premier ministre et Olivier Véran ont lancé le Ségur de la santé. Cette grande concertation réunissant près de 300 acteurs du système de santé répond à l’engagement du Président de la République en faveur de la construction, à l’issue de la crise, d’un plan massif d’investissements et de revalorisation de l’ensemble des carrières. Comme vous l’a indiqué Olivier Véran lors de son audition, le 10 juin dernier, devant la commission des affaires sociales, le Ségur de la santé repose sur quatre piliers.
Le premier chantier est celui de la transformation des métiers et de leur revalorisation. Le deuxième est celui d’une nouvelle politique d’investissement et de financement au service des soins. Le troisième consiste à simplifier radicalement l’organisation et le quotidien des équipes, en leur confiant davantage de leviers d’action et de décision. Le quatrième vise à fédérer les acteurs de la santé dans les territoires, au service des usagers.
Les conclusions de ces travaux sont attendues pour le mois de juillet. Elles doivent permettre de tirer collectivement les leçons de l’épreuve traversée, de faire le lien avec les orientations de Ma santé 2022 et, surtout, de bâtir les fondations d’un système de santé plus moderne, plus résilient, plus innovant, plus souple, plus à l’écoute de ses professionnels, des usagers et des territoires – des solutions fortes et concrètes, donc.
Concernant le secteur du tourisme, comme vous le savez, le 14 mai dernier, le Premier ministre a annoncé le lancement d’un plan de soutien interministériel d’une ampleur exceptionnelle, à hauteur de 18 milliards d’euros, dont 9 milliards d’euros d’aides directes. Les entreprises du tourisme pourront continuer à recourir à l’activité partielle, celle-ci étant prise en charge à 100 %, dans la limite de 4, 5 SMIC, jusqu’à septembre 2020. Le bénéfice du fonds de solidarité pour les indépendants est lui aussi, de façon exceptionnelle, prolongé jusqu’en décembre 2020.
Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d’État auprès du ministre de l’Europe et des affaires étrangères, travaille avec l’ensemble des membres du Gouvernement pour établir les feuilles de route des filières et des territoires spécifiquement concernés par le sujet du tourisme.
Ces deux politiques publiques, santé et tourisme, auxquelles nous sommes toutes et tous attachés, je le sais, sont aussi au cœur de votre travail de terrain et de vos missions de contrôle. Elles seront d’ailleurs l’objet de débats dans le cadre du PLFR 3, ainsi que du projet de loi et du projet de loi organique relatifs à la dette sociale et à l’autonomie, qui seront inscrits tout prochainement à l’ordre du jour de la chambre haute.
Dès lors, il ne s’agit pas ici, à cet instant, de les reproduire ou de les anticiper. La proposition de loi examinée cet après-midi vise uniquement à apporter le mieux possible une réponse à une question qui a traversé l’esprit de beaucoup de nos concitoyens, frappés par le caractère à la fois abrupt, inédit et menaçant du coronavirus. Cette question que se posent beaucoup de nos concitoyens est la suivante : comment puis-je, à mon échelle, aider ceux qui font directement front face à l’épidémie ? L’addition de telles interrogations individuelles s’est traduite par un élan commun de solidarité qui a traversé notre pays, faisant vibrer à l’unisson l’engagement des uns et l’altruisme des autres, incarnant en quelque sorte la vitalité du lien social qui nous unit.
C’est sur ce terreau qu’a germé dans l’esprit de certains de nos concitoyens l’idée de pouvoir témoigner leur reconnaissance aux acteurs de la première ligne, via le don de jours de repos et leur monétisation. C’est cet esprit-là que plusieurs groupes politiques ont relayé en déposant des propositions de loi visant à permettre sa concrétisation.
La proposition de loi adoptée par l’Assemblée nationale permet aux salariés du secteur privé et aux agents du secteur public qui le souhaitent de faire don d’une partie de leurs jours de repos pour financer des chèques-vacances au bénéfice des personnels des secteurs sanitaire et médico-social mobilisés pendant l’épidémie de Covid-19. Vous avez souhaité, en commission, matérialiser ce don d’un ou plusieurs jours de travail sous la forme d’une retenue par l’employeur des sommes correspondant à la rémunération nette du salarié, sommes qui, comme le prévoit la proposition de loi initiale, seraient versées à l’Agence nationale pour les chèques-vacances (ANCV). Nous ne souhaitons pas substituer cette possibilité à la possibilité initiale, mais les proposer toutes deux, à titre d’alternative, en vue du dialogue qui, le cas échéant, se fera jour sur ce sujet entre l’employeur et son salarié, sachant que – je le rappelle – le don en numéraire est également possible.
Il s’agit ainsi de ne pas restreindre a priori les modalités de don, en sorte de conserver le maximum de souplesse dans la mise en œuvre de ce dispositif. Celui-ci revêt en effet un caractère expérimental, eu égard à son fondement mais également à sa limitation dans le temps, que vous avez utilement précisée en commission et qu’il faudra, le cas échéant, adapter, en cohérence avec le calendrier d’examen de ce texte.
Mesdames, messieurs les sénateurs, c’est donc avec le souhait que nos débats s’inscrivent dans le droit fil de l’état d’esprit originel de solidarité qui a inspiré les auteurs de ce texte que le Gouvernement se montrera favorable à son adoption, sous réserve des précisions que je viens de faire.