Intervention de Jérôme Durain

Réunion du 25 juin 2020 à 9h00
Nouvelle ère de la décentralisation — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Jérôme DurainJérôme Durain :

Trop de promesses d’un nouvel acte de la décentralisation ont été trahies. C’est pourquoi nous avons choisi de parler d’une nouvelle ère.

Nous sommes ici, toutes travées confondues, des élus issus de millésimes différents, même s’ils sont tous de qualité. Nous avons suivi certaines étapes du cursus honorum tant décrié par M. Macron. Ce que nous avons appris au cours de notre parcours aux côtés de nos collègues élus locaux – et dans l’humilité –, c’est qu’il y a une grande intelligence dans les territoires. La crise du Covid-19 l’a illustré. Les collectivités locales ont d’ailleurs aidé à réparer les erreurs de l’État central, par exemple sur la question des masques. Il ne faut pas se contenter de saluer cette grande intelligence, il faut l’accompagner et la faire prospérer.

Cette proposition de résolution pose en quelque sorte les fondations de la nouvelle ère de la décentralisation que nous appelons de nos vœux. À une époque où beaucoup prétendent réinventer le fil à couper le beurre, nos propositions se veulent réfléchies, applicables, précises et réalistes. Vous pourrez faire le comparatif avec les propositions des députés LaREM, qui, dans leur partie « territoires », évoquaient lundi une proposition visant à « multiplier des contacts entre les écoles et les entreprises » ou à « accélérer la déconcentration des services de l’État sur le territoire ». On a connu plus précis ! Je suis d’ailleurs certain que leurs collègues sénateurs les nourriront de réflexions plus abouties.

Nous défendons avant tout une vision, non pas clientéliste visant à contenter chaque échelon territorial en distribuant des caramels, mais globale. Il s’agit de faire en sorte que les compétences de l’État soient clairement définies dans la Constitution, celles des collectivités locales devenant la règle pour tous les autres sujets. Il faut que les collectivités deviennent des acteurs à part entière, et non des figurants dépendants des dotations de l’État, qui récupèrent trop souvent de nouvelles compétences sans les moyens financiers nécessaires – mon collègue Didier Marie y reviendra. Nous voulons mettre fin à la multiplication des agences nationales, qui signifie trop souvent le retour à des pilotages à distance centralisés et sectorisés tout en signant un démembrement de l’État territorial.

Nous n’avons pas peur de dire que, en matière de développement économique, il faut rendre aux régions le pilotage de la politique de l’apprentissage en leur confiant celle du service public de l’emploi. Nous ne nous contentons pas de vouloir supprimer telle loi parce qu’elle est issue du parti d’en face. Nous voulons redonner à chaque échelon, mais aussi à l’État, leur juste place. Nous voulons achever la démocratisation des collectivités locales, avec davantage de femmes élues – je salue ma présidente de région, ainsi que Mme Pécresse ou Mme Delga –, davantage de participation citoyenne et, comme Éric Kerrouche l’a souligné, davantage de droits pour les oppositions.

Je ne reviens pas en détail sur tout ce qui a été développé par mon ami Éric Kerrouche, mais je peux vous assurer que les élus locaux, par exemple de Bourgogne-Franche-Comté, ont davantage besoin de clarification et de fluidité que de promesses sans lendemain.

Je terminerai ce propos par une réflexion et une question.

Ma réflexion est la suivante : cette nouvelle ère de la décentralisation que nous appelons de nos vœux doit être celle de l’émancipation. Éric Kerrouche parle souvent de l’infantilisation des collectivités locales par l’État central. Il faut rompre avec cette logique.

Ma question est donc la suivante, madame la ministre : estimez-vous que cet esprit d’émancipation se retrouve dans la proposition – le marché, le chantage ou l’offre ? – du Président de la République « d’un grand élan », « d’une grande porte » contre le report des élections régionales et départementales ? Je n’ai pas le sentiment que cela soit très conforme à cet esprit d’émancipation ni très respectueux de la démocratie locale. Je pense donc que, à l’issue de ce débat, vous aurez pris le soin de répondre à cette question : qu’en est-il du report des élections territoriales ?

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