Intervention de Claude Raynal

Commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation — Réunion du 8 juillet 2020 à 9h35
Contrôle budgétaire — Refonte de la péréquation - communication

Photo de Claude RaynalClaude Raynal, rapporteur spécial :

Dans le prolongement des travaux et des échanges que nous avons collectivement eus au Sénat à l'occasion de la réforme de la taxe d'habitation, il nous est apparu, avec Charles Guené, qu'un travail devait être conduit sur la question de la péréquation.

Le bureau de notre commission nous a chargés de conduire un tel travail et nous souhaitons aujourd'hui vous en restituer les premières observations et perspectives.

Aux termes de l'article 72-2 de notre Constitution, la péréquation a pour objet de favoriser « l'égalité entre les collectivités territoriales ». Cette intention est rendue d'autant plus nécessaire que nous savons combien la répartition des ressources et des charges entre les territoires est inégale et procède, souvent, de dynamiques bien indépendantes de la volonté et de l'action des exécutifs locaux.

En pratique, la péréquation prend la forme de plusieurs flux financiers qui vont de l'État aux collectivités territoriales ou s'opèrent entre les collectivités elles même. Les montants concernés sont notables puisqu'en 2019 ce sont près de 12 milliards d'euros qui avaient été mobilisés, dont les deux tiers au titre de la péréquation verticale.

Les transferts financiers mis en oeuvre au titre de la péréquation se traduisent par un nombre de plus en plus important d'instruments qui visent des catégories spécifiques de collectivités locales - je pense à la dotation d'intercommunalité perçue par les groupements de communes ou au fonds de péréquation récemment réformé et institué au profit des départements - et poursuivent des objectifs particuliers tel que le soutien aux territoires ruraux ou aux territoires urbains.

La mise en oeuvre de la péréquation implique, au-delà des seuls montants mis en jeu, de prévoir des moyens de mesurer objectivement les inégalités entre les territoires aux fins de savoir qui doit contribuer au dispositif et qui a le droit d'en bénéficier.

Comme vous le savez, ces mesures d'inégalité s'appuient sur des indicateurs de ressources et de charges souvent critiqués et, en tout cas, probablement perfectibles. Or, dans le contexte de la réforme de la taxe d'habitation ce sont précisément ces indicateurs qui pourraient, sans intervention, varier au point de faire basculer l'édifice de la péréquation.

L'identification des risques que fait peser la réforme de la taxe d'habitation sur la bonne marche de la péréquation territoriale a, dès lors, constitué un premier axe de nos travaux.

Force est de constater - et c'est heureux - que nous n'avons pas été seuls à nous intéresser à ce sujet. Ainsi, le comité des finances locales a constitué en son sein un groupe de travail nous permettant, en lien avec l'administration et les associations d'élus, de bénéficier de simulations éclairantes quant à l'impact de la réforme « toutes choses égales par ailleurs ».

Les observations et les conclusions de ce groupe de travail rejoignent pour l'essentiel celles que nous avons formées à ce jour dans le cadre de notre mission de contrôle.

Pour rappel la réforme de la taxe d'habitation sur les résidences principales impliquera qu'à compter de 2021 les communes et les EPCI ne percevront plus les recettes de cette imposition. En contrepartie, les communes percevront le produit de taxe foncière sur les propriétés bâties actuellement perçu par les départements et les EPCI bénéficieront de l'affectation d'une fraction de TVA. Dans le même temps, les départements seront compensés, également, par l'affectation d'une fraction de TVA.

Il est toutefois utile de prendre la mesure de l'importance que revêtent à ce jour les recettes de taxe d'habitation sur les résidences principales du point de vue des mécanismes de péréquation.

En effet, l'un des indicateurs les plus fréquemment employés pour comparer les ressources des collectivités locales est le potentiel fiscal ou financier. Il s'agit de la somme du produit des bases brutes d'imposition de divers impôts locaux acquittés par les ménages et les entreprises et des taux moyens constatés au niveau national pour chacun d'entre eux.

Nos travaux ont mis à jour qu'en 2019 la taxe d'habitation sur les résidences principales représentait, en moyenne, 44,8 % du potentiel fiscal des communes et 39,7 % du potentiel fiscal des EPCI. Dans ces conditions, les différences - même marginales - qui pourraient exister entre la taxe d'habitation et les ressources appelées à la remplacer sont susceptibles d'entrainer des effets importants sur l'ensemble du potentiel fiscal des collectivités locales.

Il n'est donc pas surprenant que des effets de grande ampleur ressortent des simulations que l'administration ou nous-même avons réalisées. Ainsi, le potentiel financier des communes pourrait diminuer en moyenne de 5 % tandis que le potentiel financier des EPCI se contracterait, en moyenne, de 1,5 %.

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