Intervention de Alain Griset

Réunion du 8 juillet 2020 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière économique et financière — Discussion en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission, amendements 7 15 18

Alain Griset :

Monsieur le président, monsieur le rapporteur Jean Bizet, monsieur le rapporteur pour avis Laurent Duplomb, mesdames, messieurs les sénateurs, je suis très heureux d’être devant vous pour examiner le projet de loi portant diverses dispositions d’adaptation au droit de l’Union européenne en matière économique et financière, ce que l’on a coutume d’appeler un « Ddadue ».

Le trajet de ce projet de loi n’aura pas été de tout repos. Déposé le 12 février sur le bureau de la Haute Assemblée, il aurait dû commencer d’être examiné le 24 mars.

Cela explique pourquoi la version sur laquelle vous vous êtes penchés est légèrement différente de celle que vous avez reçue trois mois plus tôt, deux lettres rectificatives l’ayant entre-temps modifiée.

Ce projet comporte des dispositions couvrant tout le spectre ou presque de notre activité économique et financière : protection des consommateurs, conformité des produits, relations interentreprises, douanes, système financier et lutte contre le blanchiment de capitaux ou du financement du terrorisme, gestion du fonds européen agricole pour le développement rural (Feader), Autorité de la concurrence.

Cette diversité témoigne de la forte activité législative du Conseil de l’Union européenne et du Parlement européen, amenant les États membres à adapter leur droit économique et financier à l’horizon des années 2020 et 2021.

Je remarque que le Sénat a été attentif aux prérogatives respectives du Parlement et du Gouvernement, en encadrant de nombreuses autorisations de recours aux ordonnances, et en réduisant notamment les délais consentis à plusieurs habilitations de quelques mois. Ces amendements ne posent pas de problème, sauf ceux qui sont relatifs aux articles 7, 15 et 18, pour lesquels le Gouvernement souhaite des délais plus importants.

Au total, vous avez consenti à maintenir treize des seize demandes d’autorisation à légiférer par voie d’ordonnance, et je vous en remercie. Je vous remercie également du travail effectué en commission sur ce texte ardu – je salue notamment M. le rapporteur, Jean Bizet, et M. le rapporteur pour avis, Laurent Duplomb. La grande majorité des trente-neuf amendements adoptés en commission recueille l’approbation du Gouvernement.

À présent, je tiens à passer rapidement en revue quelques dispositions particulièrement importantes de ce projet de loi, dont certaines auront des conséquences très concrètes pour nos concitoyens.

Tout d’abord, le présent texte renforce la protection des consommateurs en prenant en compte le développement du numérique.

Le numérique est une formidable chance pour nos concitoyens, mais il peut aussi être une source de risques pour eux. Pour reprendre le titre du paquet européen, il crée une « nouvelle donne pour le consommateur », laquelle nécessite des protections accrues.

Ainsi, le projet de loi précise les nouvelles obligations des places de marché en ligne et les conditions de commercialisation des contenus et services numériques. Il renforce les pouvoirs de l’autorité de contrôle nationale et les sanctions applicables pour mieux lutter contre les pratiques frauduleuses, dans le contexte d’une augmentation croissante de ventes via des interfaces en ligne. Il modernise les règles en vigueur face aux pratiques commerciales déloyales.

De plus, le projet de loi complète notre droit de la consommation : au titre du règlement dit « géoblocage », qui interdit les restrictions des sites en ligne fondées sur la nationalité, le lieu de résidence ou le lieu de connexion, il crée un régime de sanctions administratives. Il crée également des habilitations pour les agents de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), à en contrôler l’application dans les échanges transfrontaliers. De surcroît, il contient des mesures visant à lutter contre le géoblocage injustifié, susceptible d’affecter les consommateurs à l’échelle nationale, tout particulièrement ceux qui vivent outre-mer.

Ensuite, ce projet de loi comporte d’importantes mesures de régulation financière, notamment pour lutter contre le blanchiment d’argent. Il tire les conséquences de l’entrée en vigueur du règlement relatif aux contrôles de l’argent liquide entrant ou sortant de l’Union, dit cash control. Il organise les modalités de contrôle sur l’argent liquide dit « non accompagné », c’est-à-dire l’argent expédié via le fret, y compris le fret express, ou La Poste, pour un montant équivalent à 10 000 euros ou plus.

Le texte renforce également les garanties encadrant la rétention administrative des sommes non déclarées ou mal déclarées et les sanctions en cas de violation de la réglementation douanière.

Ce projet de loi transpose plusieurs directives européennes contribuant à une meilleure supervision des activités financières au sein de l’Union européenne portant sur l’encadrement des obligations garanties, des entreprises d’investissement, de la commercialisation transfrontalière des organismes de placement collectif en valeurs mobilières et des fonds d’investissement alternatifs dans l’Union européenne.

Enfin, le texte comporte des dispositions visant à améliorer le fonctionnement du marché intérieur, notamment en matière de transparence dans les relations interentreprises, de concurrence et de santé animale.

Pour ce qui concerne la transparence dans les relations interentreprises, le projet de loi permet de recourir à une habilitation pour inscrire dans le code de commerce des obligations supplémentaires relatives aux pratiques commerciales déloyales interentreprises au sein de la chaîne agricole et alimentaire. Il s’agit de rétablir la loyauté des transactions lorsque les relations commerciales sont trop déséquilibrées dans ce secteur, qui – le confinement nous l’a rappelé – est particulièrement important pour notre pays.

Pour ce qui concerne la concurrence, l’article 25 met le droit français en conformité avec la directive dite « ENC + » visant à doter les autorités de concurrence des États membres des moyens de mettre en œuvre plus efficacement les règles de concurrence.

Enfin, pour ce qui concerne la santé animale, je citerai notamment le chapitre VII bis nouveau, portant sur des dispositions relatives aux médicaments vétérinaires et aliments médicamenteux. Ces dispositions feront sans doute l’objet de débats.

Sur ce sujet cher au Sénat et à son président, vous avez voté en commission des articles nouveaux. Ils ont pour objets l’autorisation de la publicité à destination des éleveurs professionnels pour les vaccins vétérinaires, la lutte contre les déserts vétérinaires et la ratification d’ordonnances. Ces dispositions recueillent l’avis favorable du Gouvernement.

Mesdames, messieurs les sénateurs, tels sont les grands axes de ce texte riche et varié.

Ce projet de loi complexe comporte des dispositions multiples. Néanmoins, un seul et même esprit l’anime : celui d’une Union européenne plus protectrice, plus proche des citoyens, défendant un projet global et ambitieux d’approfondissement de la coordination entre les États membres.

Les évolutions de la réglementation européenne que ce projet de loi vise à traduire dans le droit interne vont dans le bon sens. Elles viendront renforcer la protection de nos concitoyens !

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