Intervention de Elisabeth Doineau

Réunion du 22 juillet 2020 à 15h00
Don de chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social — Adoption définitive des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Photo de Elisabeth DoineauElisabeth Doineau :

Madame la ministre, je suis ravie de vous accueillir dans cette enceinte pour votre premier texte. Nous examinons aujourd’hui la proposition de loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19. Je m’associe à l’hommage que vous leur avez rendu, chacun se reconnaîtra dans les mots que vous avez prononcés.

La commission mixte paritaire, qui s’est tenue le 2 juillet dernier, a abouti à un accord. Je m’en réjouis. Je souligne que celle-ci s’est réunie très rapidement, à peine plus d’un mois après le dépôt du texte à l’Assemblée nationale.

Il est néanmoins regrettable que l’examen des conclusions de la commission mixte paritaire intervienne si tardivement. Vingt jours après la commission mixte paritaire, le contexte a changé. Le Ségur de la santé a rendu ses conclusions. L’heure est aux départs en vacances – certains en ont vraiment besoin – et cette proposition de loi est clairement à contretemps.

L’échéance initialement proposée du 31 août 2020 était certainement trop brève pour permettre au dispositif d’être efficace en suscitant un nombre de dons suffisant. Son report au 31 octobre prochain était donc indispensable. Les modalités d’application du mécanisme sont renvoyées à un décret simple, que j’appelle de mes vœux, afin de le mettre en œuvre le plus vite possible. Nous arrivons là aux limites de l’exercice. L’élaboration d’une loi par le Parlement nécessite du temps. Nos procédures ne permettent pas de réagir aussi rapidement que nécessaire.

Je partage l’avis de notre rapporteur, Frédérique Puissat, exprimé en commission mixte paritaire : « Notre crédibilité dépendra de la promotion de ce dispositif qui s’ensuivra. » Sinon, je crains que cette proposition de loi ne soit d’ores et déjà mort-née.

Rappelons-nous les mots de Montesquieu : « Il ne faut point faire par les lois ce que l’on peut faire par les mœurs. » Or des initiatives locales ne nous ont pas attendus pour saluer les héros de cette crise. Avec la campagne intitulée « le repos des héros », un certain nombre d’organismes de tourisme se sont mobilisés, sous l’impulsion des collectivités, afin d’offrir à des soignants tirés au sort des bons-vacances.

Certains départements, comme la Creuse, mais peut-être également le vôtre, madame la ministre, ont ouvert ces bons-vacances à d’autres corps de métier particulièrement exposés, comme les hôtes de caisse, ce qui fait défaut à cette proposition de loi qui n’intervient que pour un seul secteur.

Tout comme le dispositif qui nous est soumis aujourd’hui, cette initiative vise à soutenir les professionnels du tourisme dans la relance de leur activité, tout en remerciant nos héros qui ont besoin de se ressourcer.

Enfin, il est à noter que les tirages au sort se sont tenus dès le début du mois de juin. Des centaines de soignants ont donc certainement déjà profité de ces séjours. La seule limite réside dans ce système injuste de tirage au sort. Un système plus universel aurait pu être mis en œuvre en partenariat avec les pouvoirs publics, sans forcément passer par une loi.

Sur le fond, le texte issu des travaux de la commission mixte paritaire combine les dispositifs adoptés par l’Assemblée nationale et par le Sénat.

Un salarié pourra donc soit donner une partie de son salaire, notamment s’il ne dispose pas de jours de RTT, soit donner les jours de repos qu’il a pu accumuler sur un compte épargne-temps, par exemple, en accord avec son employeur. Ces jours de repos feront l’objet d’une monétisation dont les modalités seront précisées par voie réglementaire. Cela va donc encore prendre un peu de temps.

L’acquisition de ces chèques-vacances est exonérée de l’impôt sur le revenu, ce qui est une très bonne chose. Enfin, le Gouvernement devra remettre un rapport au Parlement d’ici au 31 mars prochain afin de s’assurer de l’application réelle du dispositif et de retracer la distribution des chèques-vacances : à toute décision, il faut une évaluation.

Si cette proposition de loi répond à une intention généreuse, elle ne correspond pas forcément à l’ensemble des attentes et des revendications des personnels soignants. Le Ségur de la santé tente d’y apporter des réponses avec un niveau d’engagements financiers inédit.

À ce stade, le Ségur mobilisera plus de 28 milliards d’euros, soit 9, 1 milliards pour le fonctionnement et 19 milliards pour l’investissement, dont 13 milliards d’euros de reprise de la dette des hôpitaux.

L’essentiel des 9, 1 milliards d’euros – précisément 8, 1 milliards – servira, vous l’avez souligné, à financer les mesures sur les rémunérations et les carrières. Il s’agit d’une avancée majeure, qui permet de rattraper le retard de la France sur les pays voisins. Il s’agit surtout d’une disposition attendue par les soignants. Nous la soutenons pleinement, constatant l’investissement et l’engagement de ces derniers dans leur métier pour des rémunérations qui ne sont pas à la hauteur.

Hier, le ministre présentait les conclusions, très attendues de ce Ségur, davantage consacré aux réformes structurelles. Nous resterons vigilants quant à l’application de ce dispositif dans les territoires. Les hôpitaux, et plus largement les établissements, ne sont pas les seuls acteurs de l’offre de soins. Je salue la volonté du ministre d’associer davantage les élus, la médecine de ville et l’ensemble des parties prenantes à cette refonte fondamentale de notre système de santé.

Enfin, le groupe Union Centriste a pris part à cette concertation en transmettant au Premier ministre ses réflexions sur deux sujets centraux, la gouvernance de notre système de santé et la place de nos aînés, qui posent assurément les jalons d’une politique sanitaire plus décentralisée et plus humaniste que nous appelons de nos vœux.

Je terminerai en reprenant les mots de ma collègue Jocelyne Guidez : « Il ne serait pas envisageable un seul instant de voter contre cette mesure de solidarité ». Aussi, le groupe Union Centriste votera cette proposition de loi en espérant que cette belle intention soit réellement utile !

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