Intervention de Muriel Jourda

Commission d'enquête Évaluation politiques publiques face aux pandémies — Réunion du 2 septembre 2020 à 14h30
Table ronde avec des ordres des professions de santé

Photo de Muriel JourdaMuriel Jourda :

Sur le confinement, je souhaite savoir si, dans les rapports réguliers que vous avez eus fin janvier et en février avec le ministère, la Direction générale de la santé, le confinement général a été évoqué comme pouvant être une solution en raison de la pénurie d'équipements de protection.

Dr Jean-Marcel Mourgues. - En janvier, autant que je sache, non ; début mars, oui, puisque des rumeurs circulaient sur un confinement pour les régions les plus atteintes. Et puis se sont invités dans le débat politique des rendez-vous électoraux.

On savait que le confinement serait très probable début mars. Autant que je sache, en janvier et en février, le confinement généralisé n'était pas prononcé. Cela n'était pas stipulé pas dans les rapports que nous avions. Début mars, cela a été clairement édicté. Dans la mesure où l'on n'avait plus de maîtrise sur les clusters, la question était de savoir quand ce confinement aurait lieu.

En ce qui concerne la cacophonie dans l'expression médiatique, je ne peux que vous donner raison. Je m'exprime maintenant en tant que médecin généraliste en exercice dans le Lot-et-Garonne : tous les jours, j'entends des patients le déplorer. Je suis donc extrêmement sensibilisé à ce sujet.

Cela pose à mon sens deux questions fondamentales et il faudra que nous le rappelions à l'ensemble des médecins, un travail est d'ailleurs en cours sur ce point. A-t-on légitimité à s'exprimer sur un sujet que l'on ne connaît pas ? On ne peut pas être expert de tout. Avant de s'exprimer, a-t-on au préalable fait une expertise et a-t-on une pleine connaissance du sujet à débattre pour que l'expression soit robuste ? Manifestement, ce n'est pas le cas. Il faudra bien remettre de l'ordre dans tout cela. Reconnaissez cependant que la situation était inédite.

Le Premier ministre a incité les Français à n'aller dans les cabinets médicaux que s'ils étaient « convoqués ». Ce terme a été utilisé sans aucune intention malveillante, mais il était absolument inhabituel et pas du tout approprié. Dans les faits, les patients ne sont pas venus : soit ils ont eu peur d'être infectés dans les cabinets de soins, soit ils ont pris cela comme une injonction à ne surtout pas se déplacer, soit certains parcours de soins ont été chaotiques avec des rendez-vous annulés. Tout cela, pêle-mêle, a entraîné des retards dans les parcours, avec des pertes de chance.

Un reconfinement généralisé semble excessivement peu probable, mais, si on se trouvait face à une tension forte du système de santé nécessitant des mesures assez strictes selon les territoires, il faut espérer qu'avec les acteurs locaux et les agences régionales de santé des réunions soient organisées à l'échelon des bassins de vie et des départements pour éviter, en pratique, de trop nombreuses ruptures de soins.

Les problèmes dans les Ehpad existent en dehors même de la pandémie covid. Au fil du temps, les médecins traitants sont de moins en moins dans ces établissements, parce qu'il y a des difficultés d'accès aux soins et de coordination de soins. Il faut espérer que, dans le cadre des mesures qui suivront le Ségur, un véritable effort soit déployé en faveur des Ehpad. C'est peut-être un voeu pieux.

Je rappelle que tous les Ehpad n'ont pas de médecins coordonnateurs, et ce n'est pas la fonction de ces derniers. Améliorer l'accès aux soins et la coordination des soins dans ces établissements est un chantier considérable.

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