Intervention de Olivier Véran

Réunion du 13 octobre 2020 à 22h10
Prorogation du régime transitoire institué à la sortie de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Olivier Véran :

Madame la présidente, mesdames, messieurs les sénateurs, de part et d’autre de nos territoires, la situation sanitaire nous préoccupe. Ce n’est pas la première fois que je me trouve devant vous pour examiner un texte ayant trait, de près ou de loin, à l’état d’urgence sanitaire. Lorsque nous nous étions vus pour la dernière fois, nous avions débattu de la durée d’application du texte portant dispositions transitoires de sortie de l’état d’urgence sanitaire. Le Parlement l’avait considérablement enrichi et en avait aussi partiellement modifié la facture, ce qui est tout à fait normal. Conformément aux engagements qui avaient été pris et au respect de l’État de droit, me voici donc de nouveau devant vous ce soir pour vous demander de maintenir un certain nombre de dispositions transitoires permettant de poursuivre la lutte contre l’épidémie.

Monsieur Kanner, dans votre intervention préalable, vous faisiez état des mesures importantes qui seraient annoncées demain par le Président de la République. Je ne suis là ni pour les anticiper ni pour les commenter. En revanche, il ne vous aura pas échappé que la situation sanitaire est extrêmement instable.

À cette heure, nous sommes pourtant sûrs d’une chose : le virus n’est pas mort, et il circule vite. Vous citiez l’exemple de votre belle ville de Lille. Ce soir, l’incidence y est de 480 cas pour 100 000 habitants, et de 382 cas pour 100 000 habitants chez les personnes âgées. Quand on compare ces chiffres avec ceux de la semaine dernière, on mesure la vitesse de circulation du virus dans certaines métropoles, dont Lille, classée pour cette raison en zone d’alerte maximale.

Nous ne pouvons donc pas interrompre aujourd’hui l’ensemble des dispositions que nous sommes amenés à prendre pour protéger la santé de nos concitoyens à Lille, Paris, Lyon, Grenoble, Marseille, Saint-Étienne… La liste est connue.

J’ai suivi vos travaux de commission, mesdames, messieurs les sénateurs. Je vous remercie pour leur qualité et pour les apports que vous avez formalisés. Si je saisis bien le contenu de vos débats, le point principal porte sur la durée d’application de ces dispositions transitoires.

Je peux déjà vous répondre par l’engagement que nous avions pris ici précédemment – sur proposition des sénateurs, si ma mémoire est bonne – de travailler à un texte permettant d’inscrire dans le marbre de la loi, non pas des dispositions transitoires sur lesquelles nous devrions revenir au gré des variations du virus, mais des mesures pérennes.

Je vous confirme qu’un projet de loi sera présenté par le Gouvernement en bonne et due forme dans le courant du mois de janvier. Si l’on veut laisser suffisamment de temps pour un travail parlementaire de qualité, sans oublier les délais inhérents à la promulgation et à la parution des décrets d’application, nous aurons largement dépassé le 31 janvier, date que vous souhaitez retenir comme terme de ce texte.

Si nous adoptions un texte programmé pour prendre fin le 31 janvier 2021, nous serions donc contraints, dans le même mouvement, de vous présenter en urgence un nouveau texte de prolongation des mesures transitoires, alors même que vous seriez en train de travailler à l’inscription de mesures pérennes dans la loi…

Pour ces raisons, j’insisterai au cours des débats sur la nécessité de nous accorder plus de temps.

Par ailleurs, au regard des chiffres que j’ai annoncés, de la dynamique épidémique en France et en Europe, de l’arrivée de l’automne puis de l’hiver, les chances pour que nous n’ayons plus à combattre le virus le 31 janvier sont malheureusement nulles.

Je comprends parfaitement que vous souhaitiez limiter autant que possible dans le temps ces mesures transitoires en raison de leur caractère exceptionnel. Toutefois, si nous voulons être efficaces et faire ce travail de fond, que vous avez souhaité et qui me semble en effet nécessaire, je pense que nous devons prolonger la durée de ces dispositions transitoires. C’est pourquoi le Gouvernement reste sur sa position d’une expiration de ces mesures au 1er avril, de manière à nous laisser du temps.

Vous avez, dans le même mouvement, mesdames, messieurs les sénateurs, débattu de la nécessité de prolonger l’exploitation des données de Contact Covid et du système d’information national de dépistage (Sidep). En effet, au regard du nombre de tests que nous réalisons et de l’importance que revêtent les systèmes d’information et l’enrichissement régulier de Sidep, il me semble nécessaire de prolonger l’exploitation à but de recherche et de lutte contre l’épidémie de ces données informatiques.

Je vous remercie d’avoir accepté l’amendement visant à conférer un statut aux tests antigéniques à venir. Ces derniers apporteront des solutions, notamment dans les aéroports et pour le dépistage des populations asymptomatiques, et ils doivent avoir une traduction légale pour être pleinement efficaces.

J’ai conscience que le Gouvernement a déposé tardivement un certain nombre d’amendements et je m’en excuse. Cela va de pair avec la nécessité de parer à l’urgence en permanence.

Je sais que l’amendement visant à prolonger sans les citer un certain nombre d’ordonnances relatives à la gestion de crise sanitaire prises pendant l’état d’urgence sanitaire attire en particulier votre attention. Je comprends parfaitement vos réserves, et je suis prêt à travailler sur une rédaction permettant d’apporter les garanties que vous exigez légitimement. Toutefois, si ces ordonnances devaient tomber, cela poserait des difficultés majeures, et c’est d’ailleurs des débats et des amendements sénatoriaux qu’est née notre conviction de la nécessité d’un texte de prolongation de ces ordonnances, notamment de celles qui concernent les maisons départementales des personnes handicapées (MDPH).

Voilà, mesdames, messieurs les sénateurs, les principaux points dont il me semble nécessaire que nous puissions débattre au cours de l’examen de ce texte, sans préjuger des annonces que le Président de la République pourra faire demain, sans préjuger non plus de la nécessité d’adapter notre arsenal juridique face à cette épidémie, qui nous joue bien des tours et qui cause des ravages sanitaires majeurs dans notre pays, mais toujours dans la sérénité qu’offre l’enceinte du Sénat.

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