Intervention de Jean Desessard

Réunion du 25 juin 2008 à 15h00
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Discussion générale

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

Ainsi, l’élargissement géographique que vous préconisez pour la recherche d’emploi va aboutir à des situations ubuesques.

Prenons l’exemple d’un chômeur roubaisien qui s’est vu proposer une offre d’emploi dans le secteur du nettoyage à la gare de Lille, avec une journée de travail commençant à quatre heures du matin. Certes, la distance Lille-Roubaix est inférieure à trente kilomètres. Mais, à cette heure matinale, par quel mode de transport va-t-il s’y rendre ? Il n’a d’autre solution que la voiture. Que fera alors l’ANPE, ou la nouvelle agence X, si cette personne n’a pas les moyens de posséder une voiture, ou même simplement de l’alimenter en carburant ? La sanctionner ? La radier des listes pour refus d’une offre « raisonnable » ?

À quoi bon imposer au demandeur d’emploi un déplacement de trente kilomètres pour un salaire modique, alors que l’ANPE, ou la future entité encore innommée, ne pourra tout simplement pas constituer une liste d’offres raisonnables d’emploi ?

Prenons l’exemple de la métropole lilloise : 30 000 personnes sans emplois, dont 21 000 sont inscrites à l’ANPE, et des entreprises qui ferment chaque jour ! Comment l’ANPE va-t-elle pouvoir détecter un nombre suffisant d’« offres raisonnables d’emploi » dans un tel bassin ?

La question est posée !

Le système français de protection sociale contre la privation involontaire d’emploi a été créé à la fin de l’année 1958. Ce faisant, le général de Gaulle et les partenaires sociaux - ne les oublions pas - ont mis en place un régime fondé sur une logique assurantielle. Ce régime permet de prémunir chaque travailleur contre les incertitudes d’un marché du travail dont chacun est de plus en plus dépendant. Or c’est bien la philosophie assurantielle de tout notre système de protection en matière d’emploi qui est remise en cause par l’esprit de ce projet de loi !

Nous sommes décidés à combattre les sanctions ici prévues, qui visent à sortir un certain nombre de demandeurs d’emploi des statistiques. On se rendra très vite compte que le problème se reposera avec l’aide sociale, nécessaire à ceux qui seront en dehors du système. On aboutira donc à une paupérisation accrue, alors que la société française se doit, aujourd’hui, d’être solidaire.

Vous allez radier, radier et encore radier, et la pauvreté ne fera que s’accroître !

Monsieur le secrétaire d’État, chers collègues, si ce projet de loi est adopté, il condamnera deux millions de nos concitoyens à la précarité. Nous qui luttons pour une société plus solidaire, nous sommes décidés à combattre ce texte !

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