Intervention de Annie David

Réunion du 25 juin 2008 à 15h00
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Article 1er, amendement 24

Photo de Annie DavidAnnie David :

Comme nous avons eu l’occasion de le préciser durant la discussion générale ou en présentant nos précédents amendements, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC ne sont pas opposés par principe à l’élaboration, avec le demandeur d’emploi, d’un projet personnalisé qui lui permettrait de bénéficier d’un retour plus rapide dans le monde du travail.

En revanche, et vous l’aurez compris, notre profond désaccord porte sur les finalités du projet personnalisé que vous concevez, ainsi que sur son contenu.

De notre point de vue, la rédaction actuelle du projet de loi, qui prévoit d’intégrer les notions de « zone géographique privilégiée » et de « marché du travail local », vient contredire le principe pourtant énoncé par le Gouvernement de projet personnalisé. Comment ce projet pourrait-il être personnalisé si, à chaque demande du salarié privé d’emploi, vous lui opposez la situation du marché local de l’emploi ?

Notre amendement vise donc à substituer la rédaction actuelle par deux alinéas.

Le premier alinéa que nous proposons précise que le projet personnalisé tient compte des qualifications et des compétences acquises par le demandeur d’emploi lors de ses expériences professionnelles passées. Notre volonté est de tenir compte des expériences passées et acquises par le salarié en exercice mais n’ayant pas fait l’objet d’une procédure de validation des acquis de l’expérience. Cette disposition pourrait constituer un avantage certain pour les salariés privés d’emploi ayant travaillé longuement dans une même entreprise, mais à des postes différents, et n’ayant pas pu bénéficier pendant leur temps de travail d’une telle validation.

Le second alinéa que nous proposons fera, je le crois, l’objet d’un bien moindre consensus, si tant est que le premier fasse l’objet d’un consensus, ce qui n’est à mon avis pas certain.

Nous souhaitons permettre au demandeur d’emploi de préciser le type de contrat espéré, sa nature et sa durée lors de l’élaboration du projet personnalisé.

Vous l’aurez toutes et tous compris, cet amendement, auquel les sénatrices et sénateurs du groupe CRC sont très attachés, vise à limiter un risque qui nous semble grand, compte tenu de ce que nous avons entendu, à savoir le fait d’imposer au demandeur d’emploi toute offre proposée.

C’est la fameuse logique libérale, selon laquelle mieux vaut un emploi à temps partiel ou un emploi mal payé que pas d’emploi du tout.

Je voudrais d’ailleurs attirer votre attention sur les propos qu’avait tenus M. Xavier Bertrand lors de l’examen du projet de loi portant modernisation du marché du travail, propos qu’il a répétés à de nombreuses reprises dans les médias. À l’entendre, il voudrait limiter les temps partiels subis. Autant vous dire que c’est également notre cas !

L’amendement n° 24 concerne précisément cette situation, puisque le demandeur d’emploi qui refuse de subir un contrat à temps partiel ou un contrat à durée déterminée pourrait le faire préciser dans son projet personnalisé.

Les organisations syndicales, qui ont toutes refusé de parapher ce projet de loi, ont d’ailleurs regretté un point : tant dans les négociations que dans la rédaction de l’avant-projet de loi, le Gouvernement ignore la question pourtant cruciale de la nature du contrat que pourrait constituer l’offre raisonnable d’emploi et que le chômeur pourrait se voir contraint d’accepter.

Le risque est grand que l’une des principales missions de la nouvelle institution soit, demain, de proposer aux demandeurs d’emploi des bad jobs, ces emplois à temps très partiels, physiques, sous-payés et sans évolution de carrière.

Le patronat, quant à lui, ne s’y est pas trompé. L’ensemble des organisations représentant les employeurs n’ont pas oublié de vous apporter leur soutien, ces derniers étant trop contents de pouvoir bénéficier d’une main-d’œuvre à moindre coût, tout en évitant d’aborder la question de la rémunération et des conditions de travail.

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