La rédaction proposée pour l’article L. 5411–6–1 du code du travail est pour le moins très inquiétante dans la mesure où la formation du demandeur d’emploi est non plus un droit, mais une simple possibilité, matérialisée par les mots « le cas échéant ».
Deux lectures sont possibles, monsieur le secrétaire d'État.
Première lecture possible, l’expression « le cas échéant » signifierait que, s’il en fait la demande, le salarié privé d’emploi peut bénéficier d’un projet de formation. Si tel est le cas, je dois dire que la rédaction proposée est malvenue et qu’elle crée une ambiguïté qui desservira les demandeurs d’emploi. Il aurait été alors plus logique de recourir à une autre formulation, qui aurait pu être la suivante : « Si le demandeur d’emploi en fait la demande ».
Seconde lecture possible – et c’est ce que nous redoutons –, la formation ne serait qu’une option dont le déclenchement serait incertain, en quelque sorte conditionné par l’on ne sait quels facteurs.
On avait pourtant cru comprendre, à la lecture de ce projet de loi, que ce dernier visait à garantir aux demandeurs d’emploi certains droits. Vous en conviendrez, la formation professionnelle devrait être l’un de ceux-ci. Chacun des orateurs qui se sont succédé à la tribune lors de la discussion générale l’a dit : la formation est un droit pour les demandeurs d’emploi.
Or, depuis quelques mois, le Gouvernement et sa majorité ne cessent d’attaquer la formation professionnelle, à l’exemple de MM. Carle et Seillier, qui la mettent quelque peu à mal dans leur rapport.
Certes, je partage l’analyse, à laquelle tous se sont livrés, selon laquelle la formation professionnelle ne bénéficie pas à l’ensemble des salariés, particulièrement aux ouvriers et à celles et à ceux qui en auraient le plus besoin. Trop souvent, elle est considérée par le patronat comme un coût pour l’entreprise plutôt que comme un investissement.
Raisonner ainsi, c’est faire fi du besoin proprement humain de progresser, mais aussi des besoins structurels d’évolution des entreprises.
Le monde change, les techniques évoluent. Comment pourrait-il en être autrement ?
Il faut donc que les employeurs conçoivent la formation professionnelle comme un outil de développement et de perfection, plus que comme une charge. Mais cela est rarement le cas, et l’inversion tragique de la répartition entre capital et investissement ne manque pas d’affecter la formation professionnelle.
Le Gouvernement tire donc toutes les conséquences des critiques formulées par le MEDEF à cet égard et impose aujourd’hui aux demandeurs d’emploi ce qu’il compte exiger demain de l’ensemble des travailleurs. C’est en quelque sorte un ballon d’essai, à ceci près que, ce faisant, vous jouez contre votre camp.
Nous savons pertinemment que le Gouvernement se désengagera de toute sa responsabilité, et cela aura pour conséquence de s’en remettre aux négociations de branches, rompant ainsi avec le principe de solidarité et d’égalité de tous les travailleurs. Vous aurez alors tout loisir, comme pour les 35 heures, de jouer l’opposition des salariés entre eux : diviser, pour mieux régner !
Mais derrière tout cela se cache une obsession : en finir enfin et durablement avec l’obligation qui pèse aujourd’hui sur les employeurs de participer à la formation des salariés. Votre proposition d’instituer des droits mutables ou portatifs aurait pu être un avantage. Elle se révèle en fait comme une étape de plus dans la responsabilisation des employeurs qui entendent bien en profiter pour diminuer considérablement leur participation financière.
Je tiens à renouveler notre opposition au transfert des personnels de l’AFPA vers la nouvelle institution, véritable prélude à un démantèlement de l’Agence.
Pour toutes ces raisons, nous vous invitons à voter notre amendement.