Intervention de Marie-Pierre de La Gontrie

Commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale — Réunion du 27 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi autorisant la prorogation de l'état d'urgence sanitaire et portant diverses mesures de gestion de la crise sanitaire — Examen du rapport et du texte de la commission

Photo de Marie-Pierre de La GontrieMarie-Pierre de La Gontrie :

Nous partageons le propos liminaire du rapporteur. La situation, atypique, ressemble pour beaucoup à celle d'il y a quelques jours. Toutefois, je souhaite pondérer son appréciation : il est important que nous délibérions, car nous ne savons pas combien de temps la situation durera. Le Gouvernement a, en outre, annoncé vouloir inscrire une forme d'état d'urgence sanitaire dans le droit commun. Nous devons fixer ensemble un processus adapté. Les décisions du Gouvernement dans les jours qui viennent ne rendront pas les nôtres obsolètes.

Nous souhaitons tous que la puissance publique dispose d'outils efficaces pour lutter contre l'épidémie. Nous ne pourrions en aucun cas être taxés de rigorisme excessif dès lors que notre position est de contrôler régulièrement les pouvoirs élargis du Gouvernement consentis par le Parlement. Il s'agit non pas d'empêcher l'exécutif d'agir, mais de respecter l'esprit de la Constitution. Depuis le 23 mars dernier, nous avons eu l'occasion de faire application de ces principes. C'est en s'y référant que nous avons déposé des amendements. Notre raisonnement est qu'il n'est pas possible de prolonger excessivement la durée de l'état d'urgence sanitaire. Elle a été fixée à deux mois par la loi du 23 mars et prorogée par la loi du 11 mai, avant que la loi du 9 juillet ne crée le régime, curieux, de sortie de l'état d'urgence sanitaire, jumeau du précédent, si ce n'est l'impossibilité de décider d'un confinement total. Nous proposons de supprimer les dispositions sur le régime de sortie de l'état d'urgence sanitaire, d'autant que nous ne savons pas exactement de quoi nous aurons besoin demain.

Ensuite, nous devons imposer la tenue d'un débat parlementaire lors de la proclamation du confinement. Nous l'avons tous subi, devant la télévision. Un débat est organisé jeudi, fort bien. Mais nous devons prévoir, de façon pérenne, l'obligation d'un débat parlementaire lorsque l'état d'urgence sanitaire est proclamé. Notre proposition d'un délai de cinq jours est à discuter.

Nous proposons d'en rester, pour l'état d'urgence sanitaire, à une durée de deux mois, comme la loi du 23 mars le prévoit.

Le nombre d'habilitations à légiférer par ordonnances va au-delà des données du rapporteur. Il en existe environ 180 depuis le début de la crise sanitaire, dont certaines n'ont jamais été utilisées. Autant elles pouvaient se justifier en mars dernier, autant, sept mois plus tard, leur fondement même nous paraît très fragile.

Le délai de cinq jours pour tenir un débat devant le Parlement va dans le sens du rapporteur. Ce n'est pas parce que nous sommes rattrapés par l'actualité que son amendement est obsolète. Pensons à demain.

Enfin, avec une obstination qui l'honore, notre collègue Éric Kerrouche défend l'instauration du vote par correspondance « papier ». D'un naturel réservé, il a été bouleversé, je le crois, par l'enthousiasme du rapporteur à l'égard de ses amendements. Il n'est pas pensable que tout fonctionne normalement ou presque, sauf la démocratie. Nous devons prendre le temps de voter un dispositif adéquat.

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