Intervention de Annie David

Réunion du 25 juin 2008 à 15h00
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Article 2

Photo de Annie DavidAnnie David :

Pour moi, ce projet de loi est très grave, monsieur le président. C’est pourquoi je suis très opiniâtre ce soir. J’ai beaucoup de choses à dire, non seulement au nom de mon groupe, mais aussi au nom de toutes ces femmes et ces hommes que nous évoquons et qui sont malheureusement bien souvent démunis et privés de leurs droits.

Monsieur le secrétaire d’État, l’article 2 participe de ce que nous n’avons cessé de dénoncer, à savoir la stigmatisation des demandeurs d’emplois. Vous prétendez inciter les demandeurs d’emplois à retourner au travail. C’est dire la conception qui est la vôtre ! Pour vous, les demandeurs d’emploi ont une responsabilité dans la situation qui est la leur. Vous pensez qu’en renforçant les sanctions le retour à l’emploi sera plus rapide. Votre analyse démontre à quel point vous faites peu confiance aux chômeurs.

Les sénatrices et sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen regrettent que cet article ne prévoie aucune mesure visant à sanctionner les manquements éventuels de la future institution à l’égard des salariés privés d’emploi. Par ailleurs, aucune sanction n’est également prévue pour les entreprises, lesquelles manquent pourtant parfois à leurs obligations envers les demandeurs d’emploi. Tel est par exemple le cas des entreprises qui discriminent les salariés en fonction de leurs origines, des employeurs qui refusent systématiquement d’embaucher les demandeurs d’emploi envoyés par l’ANPE ou qui déposent des annonces telles qu’elles ne pourront jamais être pourvues.

Vous me répondrez qu’il s’agit là d’une très grande minorité, je vous le concède. Mais, curieusement, vous n’hésitez pas à faire adopter un projet de loi visant à durcir les sanctions pour les demandeurs d’emploi qui refuseraient volontairement toutes les offres qui leur sont faites, alors même – les chiffres l’attestent – que ce cas de figure ne concerne pas plus de 2 % des inscrits.

Pour les demandeurs d’emplois, il faudrait donc durcir les sanctions, alors que, pour les employeurs indélicats, il faudrait au contraire être plus « coulant » !

Je ne reviens pas sur la proposition défendue par vos amis et visant à dépénaliser le droit des affaires. Ils vont jusqu’à proposer de supprimer les peines prévues en cas d’abus de bien sociaux !

Vous faites donc comme si la responsabilité de leur situation incombait aux demandeurs d’emploi eux-mêmes, sans mentionner à aucun moment la rareté des offres, appuyant votre raisonnement sur les métiers en tension !

Ainsi, il faudrait que ces femmes et ces hommes acceptent de travailler dans des métiers qu’ils n’ont pas choisis, parce que ceux-ci sont en tension ! Vous êtes-vous posé la question de savoir pour quelles raisons ces métiers, justement, sont dans une telle situation ? N’y a-t-il pas des problèmes de conditions de travail ? Et je ne pense pas qu’aux seules conditions salariales ! À l’heure où de plus en plus de spécialistes parlent de stress au travail et de dangers pour la santé, alors que le drame de l’amiante éclate au grand jour, ne croyez-vous pas que c’est de ce côté-là qu’il faut chercher la solution ? Cessons d’imaginer que les chômeurs, qui seraient des assistés, ou je ne sais quoi d’autre, sont à l’origine de leur propre situation ! C’est en tout cas ce que pense M. Dassault, qui prononçait en commission, jeudi dernier, des paroles très graves ! C’est d’ailleurs à ce moment-là que le patron de l’UNEDIC a évoqué le problème de la productivité, je suis désolée de vous le rappeler, monsieur le rapporteur !

C’est à croire que vous menez, plus qu’aucun autre gouvernement, une politique de classes : des lois d’exceptions pour les puissants et des sanctions pour les plus faibles !

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