Je me dois de répondre de manière un peu technique à cet amendement ; je vous prie de bien vouloir m’en excuser.
Cet amendement vise à étendre les dispositions qui sont prises pour assurer la pérennité de l’activité de certaines entreprises aux particuliers qui, pour leur logement, versent un loyer à leur bailleur. C’est une question qui a une dimension sociale que tout le monde perçoit – je n’y reviens pas –, mais qui a aussi une dimension juridique.
En échange de son loyer, l’entrepreneur bénéficie d’un outil de travail. Or un certain nombre d’entreprises ne peuvent pas exploiter cet outil de travail à cause de la crise du covid ; c’est ce qu’on appelle en droit un trouble de jouissance. Au fond, et pour simplifier, on pourrait dire que l’entrepreneur n’en a plus pour son argent. Ce n’est pas la faute du propriétaire, ce n’est la faute de personne, c’est la faute d’une situation qui fait que le bien ne peut pas être exploité dans les conditions pour lesquelles le bail a été conclu.
En échange du loyer que beaucoup d’entre nous qui sommes locataires versons, le propriétaire fournit en contrepartie une habitation. Or cette contrepartie est toujours là. Nous sommes toujours logés, tandis qu’un entrepreneur n’a plus son outil de travail. C’est la raison pour laquelle, d’un strict point de vue juridique, une différence de traitement se justifie parfaitement entre les deux types de situation.
J’ajoute qu’il existe une autre notion juridique, l’abus de droit, que les tribunaux peuvent sanctionner. Bien souvent, dans une situation sociale difficile, on règle toutes ses dépenses, sauf le loyer, qui devient une variable d’ajustement. Mais nous devons aussi penser aux petits propriétaires qui comptent sur ce loyer pour vivre – je pense notamment à ceux, par exemple anciens agriculteurs ou artisans, qui ont une petite pension de retraite. Devons-nous dire à ces petits propriétaires, qui sont parfois démunis, que leur locataire a le droit de ne pas payer son loyer en raison du covid-19 ? Quand on a une pensée sociale, il faut avoir le souci de l’équilibre.
Pour toutes ces raisons, je ne suis pas favorable à cet amendement, et la commission a été convaincue, en lui donnant un avis défavorable.