Intervention de Raymonde Le Texier

Réunion du 25 juin 2008 à 15h00
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Vote sur l'ensemble

Photo de Raymonde Le TexierRaymonde Le Texier :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, ce projet de loi est sous-tendu par l’idée que les chômeurs ne sont pas totalement innocents de leur sort, surtout s’il se prolonge.

Les chômeurs, qui n’ont pas demandé à être licenciés, sont mis en grande difficulté par le licenciement et doivent de surcroît supporter l’opprobre et le soupçon constant de ne rien faire pour retravailler.

Toutes les études montrent pourtant que les contraintes ne sont d’aucune utilité si, en face, il n’y a pas de vrais emplois à proposer, à moins, bien sûr, que l’on ne se résigne à voir réapparaître par milliers et par millions ces travailleurs que l’on appelait autrefois le sous-prolétariat.

Ce texte est donc constitué d’obligations, d’injonctions et de menaces qui serviront non pas à développer l’économie, mais plutôt à réaliser des économies sur les dépenses sociales, au détriment des plus pauvres d’entre nous.

Son objet n’est pas de favoriser la création d’emploi, mais de diminuer le nombre d’allocataires de l’assurance chômage par tous les moyens possibles, même au prix d’une petite politique démagogique, et de faire, bien sûr, baisser les statistiques !

C’est la croissance qui fait les emplois, et la croissance n’est pas au rendez-vous.

On peut incriminer la conjoncture et les excès du capitalisme financier, celui que M. Bébéar appelle le « capitalisme du désastre ». On peut raconter que les caisses sont vides après avoir promis monts et merveilles. Mais tout cela ne fait pas une politique économique digne de ce nom !

Jusqu’ici, c’est la consommation qui tirait le peu de croissance de notre économie. La consommation, malgré un rebond au mois de mai, suit une tendance à la baisse. La croissance également. Nous ne la retrouverons pas en augmentant le nombre des travailleurs pauvres, le nombre de ceux qui s’échinent pour ne pas gagner de quoi vivre.

C’est une véritable poudrière, qui touche maintenant par contagion les petits entrepreneurs, les commerçants et les artisans. Aucune perspective n’est aujourd’hui offerte, si ce n’est celle d’une aggravation de la condition de la plupart de nos concitoyens. Ce texte contribue à cette aggravation de manière modeste, mais significative.

Quant aux salariés, on leur a promis qu’ils pourraient travailler plus pour gagner plus. Ce texte leur intime l’ordre, en toutes lettres, de travailler plus pour gagner moins, en faisant peser sur eux la menace terrifiante de ne plus rien gagner du tout !

Nous exprimons notre totale désapprobation à l’égard d’une politique qui laisse filer les profits spéculatifs aux dépens du partage équitable des richesses, d’une politique entièrement soumise au libéralisme le plus doctrinaire, loin de tout réalisme, loin de ce « bon sens » que vous revendiquez.

Monsieur le secrétaire d’État, vous nous trouvez durs avec ce texte, mais c’est parce qu’il est dur avec les Français ! Vous nous dites qu’il ne faut pas tomber dans la caricature. Pourtant, sous le vernis de la raison, ce texte frôle la caricature !

Vous nous dites que ce texte correspond à ce que les Français attendaient. Pour notre part, nous croyons que les Français n’attendent pas plus de précarité, pas plus de bas salaires. Nous croyons que ce n’est pas ce que les Français vous ont demandé.

Nous croyons que les Français n’attendent pas de voir la baisse du chômage sur le petit théâtre de la politique, mais qu’ils attendent juste de pouvoir vivre décemment des fruits de leur travail. Ce texte ne les y aidera probablement pas.

« La croissance, j’irai la chercher avec les dents », avait lancé M. Sarkozy pendant sa campagne. Malheureusement, même avec les dents, cela ne suffira pas !

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion