Intervention de Jean Desessard

Réunion du 25 juin 2008 à 15h00
Droits et devoirs des demandeurs d'emploi — Vote sur l'ensemble

Photo de Jean DesessardJean Desessard :

J’ai du mal à saisir la cohérence de ce projet de loi.

Vous affirmez qu’il y a entre 400 000 et 500 000 offres d’emploi non pourvues, et seulement 5 % des chômeurs seraient réticents à travailler. Pourquoi aurait-on du mal à faire la liaison entre ces 95 % de chômeurs qui seraient prêts à travailler et les 400 000 à 500 000 offres d’emploi non pourvues ?

Il ne vous vient pas à l’esprit que ce pourrait être en raison des bas salaires, de la pénibilité du travail, de la formation ! Sur tous ces points, vous n’avez apporté aucune réponse.

Vous nous dites qu’il faut établir un bilan personnalisé, accepter de parcourir un certain nombre de kilomètres pour aller trouver du boulot. À quoi cela sert-il ?

Regardez ce qui se passe aujourd’hui ! Un cadre refuse qu’on passe l’aspirateur dans son bureau à dix heures du matin : on oblige donc des personnes à venir passer l’aspirateur à sept heures. Les boulots les plus pénibles, les moins payés, sont effectués de sept heures à neuf heures du matin pour ne pas déranger ceux qui travaillent, eux, entre dix heures et dix heures et demie !

Pour adapter l’organisation du travail à la clientèle, on fait venir le personnel quand les clients sont là, mais on ne va pas le payer quand il y aura moins de clients ! Donc les personnes viennent le matin, repartent, puis reviennent !

Est-ce là le projet de société que vous proposez ?

Quelles sont les propositions du Gouvernement sur ces conditions de travail, sur ces horaires ? Car c’est là qu’est la vraie question ! Si l’on proposait d’autres salaires, d’autres conditions de travail, d’autres horaires, peut-être davantage d’offres d’emploi seraient-elles satisfaites ! Après tout, les gens ne sont pas obligés de tout accepter !

Indiscutablement, nous n’avons pas la même approche du problème.

En fin de compte, votre projet, sous couvert de faire travailler tout le monde, a pour objet d’adapter l’économie française en « cassant » le droit du travail, en ajustant les conditions de travail des salariés français à la compétitivité internationale. Du reste, ce n’est pas la première fois que le Gouvernement nous soumet un texte allant dans ce sens, et M. Sarkozy a bien expliqué que telle devait être l’orientation à suivre.

Mieux vaudrait, dans la perspective du « projet humain » dont parlait M. Seillier, s’interroger sur l’évolution de la société au regard des exigences écologiques, sur les ressources qu’il faut garantir pour demain, sur le type de travail que l’on souhaite promouvoir. Veut-on que les personnes vivent décemment de leur travail ? Peut-on se satisfaire que, au contraire, perdant sans cesse de leur pouvoir d’achat, elles soient obligées d’aller habiter de plus en plus loin de leur lieu de travail parce qu’elles ne peuvent plus payer leur loyer ?

Au lieu de s’interroger sur le projet de société que l’on veut pour demain, on tente de s’adapter aux systèmes économiques des pays émergents et à la pauvreté.

Monsieur le rapporteur, monsieur le secrétaire d'État, vous croyez que vous allez enrichir la France. Au contraire, avec ce projet de loi, et d’autres, les pauvres vont s’appauvrir. Peut-être les riches vont-ils s’enrichir…

Aucun commentaire n'a encore été formulé sur cette intervention.

Inscription
ou
Connexion