Le choix du Gouvernement de remettre en cause l’interdiction des néonicotinoïdes nous est présenté comme un choix courageux, réaliste, empreint de rationalité économique, qui allierait écologie et agriculture et qui s’inscrirait dans un plan plus global d’aide et de sauvegarde de la filière betteravière, de soutien à la recherche d’alternatives à ces pesticides nocifs. On nous dit aussi que la dérogation à l’interdiction de l’usage des néonicotinoïdes serait suffisamment encadrée pour ne pas constituer une régression environnementale. Il s’agirait donc d’un choix responsable. Pourtant, il n’en est rien, car, ce qu’illustre ce choix, c’est surtout l’incapacité de l’État et du Gouvernement à prendre la mesure de l’urgence environnementale et à accompagner la transition agroécologique, et ce depuis de trop nombreuses années.
La Cour des comptes nous l’a très justement rappelé il y a peu, l’échec des politiques publiques qui se sont succédé depuis plus de dix ans pour atteindre l’objectif d’une véritable transformation des modes de production agricole est sans appel : échec à réduire l’utilisation des pesticides, échec à faire évoluer les pratiques agricoles malgré une mobilisation de près de 400 millions d’euros de fonds publics – je le rappelle – pour la seule année 2018.
Comme pour le refus d’encadrer la vente des pesticides ou d’interdire le glyphosate, ce choix n’est rien d’autre que la reprise d’une doctrine d’intervention publique largement dépassée, en lieu et place d’une véritable planification volontariste portée tant par le ministère de l’environnement que par celui de l’agriculture ; une doctrine de l’ancien monde, qui prétend qu’il est possible de réguler les pesticides, en évaluant le risque substance par substance et en définissant les conditions d’un usage contrôlé, censé apporter une garantie de protection pour la santé humaine et l’environnement.
Or, dès 2005, l’INRA insistait sur la méconnaissance des effets des pesticides dans leur ensemble et la nécessité d’inciter les agriculteurs français à une moindre consommation. En 2008, le plan Écophyto se fixait l’objectif de réduire de 50 % la consommation de pesticides agricoles en dix ans. Nous en sommes loin ! C’est pourquoi nous demandons la suppression de l’article 1er.