Intervention de Stéphane Ravier

Réunion du 29 octobre 2020 à 14h30
Prorogation de l'état d'urgence sanitaire — Discussion générale

Photo de Stéphane RavierStéphane Ravier :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, savez-vous pourquoi on évoque une deuxième vague de l’épidémie ? Parce qu’il y en a eu une première, pardi ! Une première, et vous n’en avez rien appris : neuf mois et 35 785 morts plus tard, vous nous imposez une nouvelle prorogation de l’état d’urgence sanitaire, piétinant allègrement le Parlement, l’État de droit et les libertés économiques et individuelles des Français. Votre mode de gouvernement, c’est la réaction plutôt que l’anticipation. Tel le hamster dans sa roue, vous ne cessez de courir derrière un virus que, décidément, vous n’arrivez jamais à rattraper. Vous courez, mais ce sont les Français qui sont fatigués, et ce sont les Français que vous mettez en cage.

Plus de neuf mois après avoir été informés par vos prédécesseurs de l’arrivée en France de la covid-19, nos compatriotes sont aussi dépourvus en moyens qu’au début de l’année. Pendant ce temps, nos voisins italiens, dès le mois de mars, ont recruté 20 000 soignants, soit 5 000 médecins spécialisés, 10 000 infirmiers et 5 000 aides-soignantes. Ils ont même prévu de recruter leurs médecins à la retraite. Le nombre de lits en soins intensifs a été augmenté de 50 %. Comme quoi, c’est possible !

Qu’avez-vous prévu, vous, de structurel et de durable pour nos hôpitaux saturés ? Le rapport du général Lizurey sur le bilan de la gestion printanière répond à cette question, et c’est un implacable réquisitoire. Pour mémoire, et à toutes fins utiles, je rappelle qu’un certain Jean Castex a été le directeur de l’hospitalisation et de l’organisation des soins au ministère des solidarités et de la cohésion sociale, de 2005 à 2006, et qu’à ce titre il est l’un des pères de la loi Hôpital, qui introduit la notion d’objectifs et de rentabilité dans la gestion hospitalière. Il est ensuite directeur de cabinet de Xavier Bertrand au ministère de la santé pendant deux ans, puis conseiller chargé des affaires sociales de Nicolas Sarkozy à l’Élysée. Il est donc l’un des principaux artisans de la politique hospitalière, ou plutôt anti-hospitalière, de 2005 à 2012. Résultat : les opérations sont déprogrammées et des patients mis en danger ; notre tissu économique se déchire ; les droits du Parlement reculent ; notre démocratie et nos libertés publiques sont menacées. N’en jetez plus, madame la ministre, la coupe est pleine, vraiment pleine !

Vous accorder tout pouvoir sans contrôle jusqu’au 1er avril est inacceptable. Je refuse quant à moi de cautionner votre coup de force, conséquence de votre état de faiblesse. Le Parlement, le Sénat en tout cas, n’est pas une chambre d’enregistrement des dérives autoritaires de l’exécutif.

Enfin, pour couronner le tout, le ministre de la justice, dans la situation explosive que nous subissons, demande des alternatives à l’incarcération pour faire face à la densité carcérale en contexte épidémique et, tel un vulgaire préfet de police de Paris, le président de l’Assemblée nationale culpabilise à son tour les Français, en les rendant d’ores et déjà responsables de leur possible contamination. M. Ferrand est non plus au perchoir, mais perché au sommet de l’indécence.

La coupe est vraiment pleine, madame la ministre !

Au bilan sanitaire désastreux qui est le vôtre est venue s’ajouter la perquisition du domicile du ministre de la santé dans le cadre d’une information judiciaire sur la gestion de la crise. Est-ce la raison qui explique son absence devant la représentation nationale, une absence qui s’apparente à un véritable mépris de notre assemblée ?

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