Je peux entendre les arguments de M. le rapporteur et de Mme la ministre, mais, en la matière, il me semble qu’il faut entendre l’urgence. Ce sont de véritables cris d’alarme qui sont lancés à la fois par des personnels de l’administration pénitentiaire, par des détenus et par des fonctionnaires, notamment de la PJJ. Je me permets ainsi de vous lire le témoignage d’une éducatrice de la PJJ.
« […] Des moments difficiles, douloureux, j’en ai vécu depuis que j’exerce ce métier. C’est la première fois que je ressens viscéralement ce besoin d’essayer d’alerter, même si je doute de l’intérêt que portera le grand public à ce qui se passe derrière ces murs épais.
« Je rencontre des gosses qui n’ont pas de masques et qui, pour certains, se sentent, sinon en danger, au moins délaissés. Ce n’est pas la première fois, et pour beaucoup ce ne sera, hélas ! pas la dernière.
« Je porte un masque quand je vais les voir, quand je traverse ces couloirs étroits, quand je dois parfois attendre que la grille suivante s’ouvre, pressée contre des dizaines de détenus qui attendent aussi pour passer. J’emporte avec moi des masques chirurgicaux pour eux, pour les entretiens éducatifs que je mène dans une petite cellule aménagée en bureau de fortune.
« Au mois de juillet, certains d’entre eux s’étonnaient : “On a besoin d’un masque ? Pourquoi, il est revenu le virus ?” Naïveté de gosse. Parce que, oui, ce sont des gosses, persuadés que, si les adultes ne se protègent pas, ne les protègent pas, c’est que le virus ne circule plus… Je me suis entendue murmurer qu’il n’était jamais parti, ce virus.
« Impuissante, tiraillée par cette envie de leur dire une vérité contre laquelle ils n’ont aucune prise, aucun maigre moyen d’agir, je suis sortie de là effondrée. »
J’entends bien ce qui vient d’être dit, j’entends bien qu’il faudra discuter de ce sujet lors du projet de loi de finances, mais, monsieur le rapporteur, madame la ministre, considérez avec nous qu’il y a urgence !