Je m'intéresse uniquement aux faits et aux réalités de terrain, je ne suis pas dans l'idéologie ni dans le parti pris. Les chiffres que je vous présente sont le fruit d'une politique qui nous amène tous à rejeter ces crédits.
Le plan de relance se traduit par un effort de l'État sur l'hébergement. De multiples dispositifs ont été créés, avec des coûts différenciés. Les prévisions d'arrivée de migrants à héberger sont difficiles à réaliser, mais année après année le budget est en sur-exécution dans la mesure où le nombre de migrants a été systématiquement minoré. Après le Covid-19, l'État annonce un nombre de migrants égal à celui de 2019. Pour répondre à Jérôme Bascher, plus il y a de migrants, plus on a besoin d'ADA. On aurait pu penser que ces budgets allaient diminuer eu égard à la baisse des arrivées pour 2020, mais ce n'est pas le cas. Les délais de traitement de l'Office français de protection des réfugiés et apatrides (Ofpra) sont passés à 275 jours, et je rappelle qu'un mois en plus de traitement des demandes entraine une dépense de 42 millions d'euros supplémentaires pour l'ADA. Il n'y a donc pas de baisse de dépenses sur lignes.
Heureusement, cher Rémi Féraud et chère Sophie Taillé-Polian, que chacun a encore sa liberté de parlementaire ! Je le redis : mon intervention ne se veut absolument pas polémique. Je note, comme vous, que les crédits de cette mission, dont je m'occupe depuis trois ans, sont volontairement insuffisants, ce qui est grave. Mes collègues en région parisienne voient comme moi le nombre de malheureux qui dorment sur nos trottoirs : c'est ignoble pour un grand pays comme la France !
L'exécution des OQTF s'inscrit dans une politique d'ensemble. Le ministre de l'intérieur s'est d'ailleurs rendu à cette fin dans différents pays. Évidemment, les OQTF peuvent toujours être contestées devant les tribunaux. Plusieurs parlementaires ont aussi manifesté leur étonnement parce que de nombreux pays que nous aidions, comme le Mali, refusent de reprendre des laissez-passer consulaires. Pour améliorer le taux de retours, il faut une pression politique. Certes, tout cela sort de la question budgétaire, mais les chiffres trahissent l'absence de volonté politique de traiter cet aspect de la question. Ces dernières vingt-quatre heures, plus de 600 migrants sont arrivés à Lampedusa. Est-il raisonnable de laisser entrer toutes ces personnes sur notre territoire une semaine après le drame de Nice ?
Les seuls efforts consentis budgétairement parlant portent sur les hébergements, notamment via la création de CRA et de places supplémentaires pour les centres d'accueil pour demandeurs d'asile (CADA). Néanmoins, ces efforts sont systématiquement insuffisants, j'en veux pour preuve le nombre de malheureux qui dorment sur les trottoirs de nos grandes villes. La difficulté à obtenir des informations pour 2020 de la part du Gouvernement n'est pas un signe positif. Idem en ce qui concerne les décisions de justice relatives à l'éloignement. Depuis trois ans, les budgets consacrés à l'éloignement stagnent à un peu moins de 40 millions d'euros. La police aux frontières (PAF) ne dispose que d'un avion de type Beechcraft 1900 de 19 places parvenant à peine à traverser la Méditerranée et le Gouvernement songe à utiliser les nouveaux Dash de la sécurité civile destinés à la lutte contre les incendies de forêt afin d'exécuter les éloignements.