Intervention de Frédérique Puissat

Réunion du 4 novembre 2020 à 15h00
Inclusion dans l'emploi par l'activité économique — Adoption des conclusions d'une commission mixte paritaire sur une proposition de loi

Photo de Frédérique PuissatFrédérique Puissat :

Sur proposition de l’Assemblée nationale, nous avons plafonné le montant maximal que le décret pourra imposer. Ce plafond est particulièrement élevé, puisqu’il s’établit au niveau du revenu de solidarité active (RSA) pour chaque personne embauchée, qu’elle ait précédemment été allocataire du RSA ou non. Il n’apparaît donc pas à mes yeux comme une garantie et il reviendra à chaque département d’apprécier si la participation à cette expérimentation est cohérente avec sa politique en matière d’insertion.

Par ailleurs, le texte de la commission mixte paritaire permet au Gouvernement de déroger par décret au nombre maximal de territoires pouvant être habilités.

J’ai eu l’occasion de dire que le nombre de soixante territoires était bien plus élevé que le nombre maximal de territoires devant être envisagés par la proposition de loi que préconisait le comité scientifique. Je rappelle que, pour celui-ci, l’entrée dans le dispositif de trente nouveaux territoires constituait un maximum.

J’espère que, si le nombre de soixante territoires expérimentateurs est un jour atteint, les demandes de dérogation qui pourront être adressées au Gouvernement seront examinées avec rigueur s’agissant du respect du principe de non-concurrence entre les entreprises à but d’emploi (EBE) et les entreprises locales, notamment celles de l’économie sociale et solidaire, et que le travail d’évaluation continuera à se poursuivre avec attention et objectivité.

J’en viens au volet relatif à l’insertion par l’activité économique (IAE). Le Sénat, tout en approuvant globalement les mesures pragmatiques proposées par le texte, a apporté des améliorations visant à répondre aux interrogations des acteurs de terrain. Le texte de la commission mixte paritaire reprend l’ensemble de ces apports.

Ainsi, le texte prévoit la possibilité, rétablie par le Sénat, de déroger, à titre exceptionnel, pour les salariés seniors rencontrant des difficultés particulières, à la durée maximale de vingt-quatre mois de renouvellement des CDD au-delà de l’âge de 57 ans, en complément de la faculté de conclure un « CDI inclusion senior », dans les entreprises d’insertion, les ateliers et chantiers d’insertion et les associations intermédiaires. Sur ce point de divergence, nos discussions avec l’Assemblée nationale nous ont permis de rapprocher nos points de vue.

Les précisions apportées à la procédure du « Pass IAE », à l’article 1er, figurent à l’identique dans le texte de la commission mixte paritaire, comme l’équilibre trouvé par le Sénat à l’article 2 ter concernant la possibilité pour le préfet d’accorder des dérogations au plafond de 480 heures de mise à disposition applicable aux associations intermédiaires. À l’article 3 bis, le texte reprend les garde-fous apportés par le Sénat au cadre de l’expérimentation du « contrat passerelle », qui n’était pas accueillie favorablement par les réseaux de l’IAE. Nous avons introduit une condition d’ancienneté de quatre mois dans un parcours d’IAE pour les bénéficiaires, limité la durée de la mise à disposition à trois mois renouvelables et prévu de dispenser de période d’essai le salarié en cas d’embauche par l’entreprise utilisatrice, ce qui semble avoir rassuré les acteurs.

En complément de ce « contrat passerelle » et dans le même objectif de créer des ponts entre la structure d’insertion par l’activité économique (SIAE) et l’entreprise de droit commun, la commission des affaires sociales avait introduit, à l’article 3 ter A, un dispositif de « temps cumulé » visant à permettre une transition progressive entre un contrat d’insertion et un CDI ou un CDD à temps partiel. Ce dispositif a également été retenu par la commission mixte paritaire.

L’ensemble de ces mesures doit être envisagé en lien avec l’effort financier important consenti en faveur de l’IAE dans le cadre du plan de relance et de la « stratégie pauvreté » et devrait contribuer à soutenir les initiatives de terrain et à ouvrir le champ des possibles dans ce secteur. Nous saluons ces avancées, notamment sur le plan budgétaire.

J’en viens au titre III et à l’article 7, relatif à l’articulation avec les allégements généraux de cotisations sociales du « bonus-malus » de contributions d’assurance chômage portant sur les contrats courts. Je rappelle que la commission des affaires sociales avait supprimé cet article afin de réaffirmer son opposition au bonus-malus et de tenir compte de la concertation en cours sur la réforme de l’assurance chômage.

Ce dispositif étant déjà inscrit dans le droit et étant prêt pour une entrée en vigueur au début de l’année 2021, il a cependant paru préférable de rétablir l’ajustement proposé, faute de quoi l’application du bonus-malus serait préjudiciable aux entreprises, notamment les plus vertueuses. Cet article prévoit également d’exonérer les contrats d’insertion du bonus-malus, ce qui semble raisonnable.

Il est entendu que cela ne vaut pas approbation du principe du bonus-malus et je demeure convaincue, sur le fond, que ce n’est pas la solution appropriée pour lutter contre les abus du recours aux contrats courts.

À l’article 9 quater, l’expérimentation d’un contrat de professionnalisation « sur mesure », créée par la loi pour la liberté de choisir son avenir professionnel, sera bien prolongée de deux ans, comme l’a proposé le Sénat, pour permettre son appropriation par les SIAE.

Enfin, à l’article 9 quinquies, le Sénat avait introduit, sur l’initiative du Gouvernement, une expérience visant, en complément des initiatives existant déjà dans certaines branches, à encourager le dialogue social au sein des SIAE et à permettre une meilleure représentation des salariés en parcours d’insertion. La commission mixte paritaire a retenu une nouvelle rédaction de cet article, qui tend à prévoir, au lieu d’une instance de dialogue social ad hoc, la création d’une commission « insertion » au sein du comité social et économique (CSE), ce qui répond davantage aux attentes des partenaires sociaux. Ce dispositif aura l’avantage d’être moins lourd pour l’employeur, tout en remplissant les mêmes objectifs.

Enfin, je souligne qu’il appartient désormais au Gouvernement de mettre en œuvre rapidement les mesures que nous adoptons aujourd’hui.

Permettez-moi, madame la ministre, de terminer par un petit clin d’œil : en première lecture, j’avais débuté mon intervention, en demandant où en était la rédaction du décret d’application de la loi permettant d’offrir des chèques-vacances aux personnels des secteurs sanitaire et médico-social en reconnaissance de leur action durant l’épidémie de covid-19, que le Gouvernement nous avait demandé d’adopter en urgence l’été dernier.

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