Intervention de Abdallah Hassani

Réunion du 4 novembre 2020 à 21h30
Restitution de biens culturels au bénin et au sénégal — Adoption en procédure accélérée d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Abdallah HassaniAbdallah Hassani :

Monsieur le président, madame la ministre, mes chers collègues, ce projet de loi prévoit le retour au Bénin, leur terre d’origine, de vingt-six objets du palais de Béhanzin conservés au musée du quai Branly et la restitution au Sénégal d’un sabre et de son fourreau attribués à El Hadj Omar Tall, chef toucouleur.

Il fait suite à une demande expresse de ces deux États.

Il ne met pas fin au caractère inaliénable de nos collections publiques. Il témoigne d’une exigence de vérité, d’un souhait commun d’apaiser des conflits de mémoire, d’une confiance en un partenariat équilibré.

Il faut se réjouir de cette coopération !

Ce projet de loi concrétise un engagement fort du Président de la République, prononcé en novembre 2017 devant les étudiants de l’université de Ouagadougou.

Plus de la moitié de la population africaine a aujourd’hui moins de 25 ans. Dans mon département d’outre-mer, entre côtes africaines et Madagascar, la croissance de la démographie est sept fois plus forte que la moyenne nationale et les moins de 18 ans sont majoritaires. C’est une grande chance, mais aussi un lourd défi, pour Mayotte comme pour l’Afrique. Et nous savons l’importance, pour la construction harmonieuse de tous ces jeunes, de la connaissance de leur propre histoire.

Peu de jeunes Sénégalais ou Béninois ont les moyens de voyager, de venir en France pour voir ces objets. Les restitutions – nous aurons le débat sur la question de savoir s’il faut maintenir ce terme ou lui préférer ceux de « retours » ou « transferts » – leur permettront d’accéder chez eux à des œuvres de leur culture, de leur civilisation et de se les approprier.

Ces œuvres ont une forte portée symbolique. Apportées en France lors de l’expansion coloniale comme des objets de curiosité exotique, elles avaient d’abord, pour la plupart, une fonction spirituelle. Témoins d’un passé prospère, elles participent à un sentiment de fierté, de confiance en soi de populations trop souvent dépouillées de leur histoire.

Il est donc important qu’elles soient exposées à tous – le Bénin et le Sénégal s’y sont engagés – et présentent des garanties de bonne conservation, dans le cadre d’une coopération repensée. La réalisation concrète du nouveau musée d’Abomey s’inscrira dans cette vision.

Ces biens, revenus à leur terre originelle, ne seront certes plus notre propriété, mais ils resteront toujours porteurs d’universel, parce qu’issus du génie humain.

Nous restons vraiment, avec ce texte, dans le domaine de l’exception. C’est pourquoi la création d’un comité chargé d’émettre un avis sur les restitutions, décidée par notre commission, ne me semble pas opportune. Nos musées nationaux resteront, avec leurs collections, des vecteurs de connaissance de l’autre et d’histoire partagée. Prêts et expositions temporaires doivent se multiplier afin de profiter au plus grand nombre.

Certes, on peut croire que des demandes de restitution, limitées jusqu’à présent, se feront plus nombreuses et pourront sembler tout aussi légitimes.

Mais ce sera à la France de décider, au cas par cas, en fonction d’ailleurs des terres de conflits, hélas propices aux destructions et aux pillages. Les équipes de scientifiques spécialistes des œuvres demandées éclaireront le choix du Gouvernement et il nous reviendra, à nous, parlementaires, la décision de l’approuver, ou non, au cas par cas.

Le groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants votera ce projet de loi.

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