Intervention de Laurent Duplomb

Réunion du 17 novembre 2020 à 21h30
Adaptation au droit de l'union européenne en matière économique et financière — Adoption en nouvelle lecture d'un projet de loi dans le texte de la commission modifié

Photo de Laurent DuplombLaurent Duplomb :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, la commission mixte paritaire a failli être conclusive.

Nos collègues députés, y compris, j’y insiste, certains qui appartiennent à la majorité, étaient d’accord pour aboutir à un tel résultat, car ils ne concevaient pas une seconde que nos négociations puissent échouer sur un sujet aussi consensuel que la régulation des géants du numérique.

Pourtant, au dernier moment, le Gouvernement a tranché : ce sera non ! Non, les consommateurs n’ont pas le droit de recouvrer leur libre choix en matière de smartphone. Non, ils ne pourront pas facilement migrer d’une plateforme à une autre grâce à l’interopérabilité. Non, la lutte contre les interfaces trompeuses n’est pas une priorité.

Pourquoi ce non, me direz-vous ? Pourquoi refuser ces nouveaux droits aux Français ? Parce que la Commission européenne a enfin décidé de publier ses propositions sur le sujet en décembre prochain ? C’est la raison avancée par le Gouvernement pour ne pas agir au niveau national.

Je souhaite tout d’abord rappeler qu’il n’y a pas de débat entre nous sur la question de savoir s’il faut agir au niveau européen ; très clairement, c’est l’idéal !

Le débat se situe ailleurs, sur la question de savoir si, dans l’attente d’un texte européen, les parlements nationaux doivent se dessaisir de leur pouvoir et se faire hara-kiri. Pour notre part, nous répondons par la négative : il ne faut pas que les parlements nationaux renoncent à leurs prérogatives sous prétexte que la Commission européenne est sur le point de publier une première version de texte. Ce serait dangereux, non seulement d’un point de vue démocratique, mais aussi parce que, dans les cas comme celui qui nous occupe, les négociations européennes prennent beaucoup de temps, on le sait.

Qui peut croire que la bataille au niveau européen durera quelques mois seulement ? Elle sera d’une très grande intensité. À la fin du mois d’octobre dernier, la presse a révélé les intentions de Google pour contrer le texte proposé par la Commission européenne. Tous les moyens seront les bons : aide au gouvernement américain, sollicitation des alliés transatlantiques, exploitation des divisions entre ministères européens, etc. Bref, il faudra du temps avant que l’initiative européenne ne trouve une application sur le terrain.

Or du temps, monsieur le secrétaire d’État, nous n’en avons pas ! Pour mettre fin à l’hégémonie de quelques-uns sur internet, hégémonie qui se fait au détriment des consommateurs et de nos entreprises, c’est maintenant qu’il faut agir. Nous avons besoin d’un texte applicable sans délai.

D’ailleurs, si j’en crois une récente interview que vous avez donnée sur le sujet connexe de la haine en ligne, c’est aussi, désormais, votre conviction. Permettez-moi de vous citer : « Le processus législatif européen est long, et le texte pourrait ne pas être adopté avant plusieurs mois […]. Il est donc indispensable d’agir dans l’intervalle pour responsabiliser davantage les plateformes. » Ce n’est pas moi qui le dis, c’est vous !

Dois-je comprendre que vous vous ralliez à notre méthode, monsieur le secrétaire d’État, et que, puisque vous nous rejoignez sur le fond, il n’y a plus de désaccord ?… Si tel est le cas, il vous suffit de retirer votre amendement de suppression. Faites-le sans délai !

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