Intervention de Joël Guerriau

Réunion du 25 novembre 2020 à 15h00
Nécessité de reconnaître la république du haut-karabagh — Adoption d'une proposition de résolution

Photo de Joël GuerriauJoël Guerriau :

Monsieur le président, monsieur le secrétaire d’État, mes chers collègues, durant six semaines, le Haut-Karabagh, majoritairement peuplé d’Arméniens, au sein du territoire de l’Azerbaïdjan, a une nouvelle fois été l’objet d’affrontements. Ce conflit, qui remonte à plus d’un siècle, n’a jamais été résolu.

Comment imaginer qu’au XXIe siècle on puisse encore se livrer à des exactions abjectes contre des êtres humains ? Le conflit récent au Haut-Karabagh a donné lieu à des vidéos et à des photos, qui circulent sur les réseaux sociaux, montrant des atteintes à la dignité humaine. Les criminels eux-mêmes en ont assuré la diffusion et fait la publicité. Ces actes barbares illustrent de manière terrifiante la prégnance d’une haine ethnique, tout comme le choix du commandement militaire de bombarder massivement des zones d’habitations civiles.

En préambule à toute négociation, il est pour nous primordial que les militaires qui commettent de tels actes de barbarie soient jugés et condamnés sévèrement par le pays dont ils portent l’uniforme. Le gouvernement qui procédera de la sorte gagnera en légitimité en démontrant ainsi qu’il ne couvre pas et n’encourage pas des faits aussi inadmissibles.

Si le droit international est bafoué par des actes de guerre et de violence, la France a le devoir de réagir. Le recours à la force est inacceptable. Il appartient à l’ONU de faire respecter ce principe fondateur de nos relations internationales.

Il nous paraît essentiel que soit ouverte une enquête sur les manquements graves qui ont été commis dans le conflit qui vient de s’achever, comme l’usage d’armes contre des civils. De même, la destruction, le pillage et la profanation du patrimoine historique et religieux doivent conduire à la condamnation des auteurs de ces actes inacceptables.

Ce n’est qu’à la lumière d’une enquête approfondie et détaillée que nous pourrons déterminer les responsabilités et renouer une relation de confiance. Les accords de paix qui viennent d’être signés ne peuvent en aucun cas effacer les crimes de guerre, lesquels doivent impérativement être punis. Leurs auteurs doivent être traduits en justice.

Si les canons se taisent au Haut-Karabagh, ce silence n’est pas la paix. Un accord de cessez-le-feu a été conclu sous l’autorité de la Russie. Le conflit est ainsi une nouvelle fois gelé, mais il n’est pas réglé.

La proposition de résolution que nous examinons aujourd’hui vise notamment à inviter le Gouvernement français à reconnaître la République du Haut-Karabagh. On peut s’interroger. La France est coprésidente du groupe de Minsk aux côtés de la Russie et des États-Unis. Cette fonction de médiation n’implique-t-elle pas une recherche de solution sans prendre parti ? N’est-il pas essentiel que notre pays conserve une position d’impartialité ?

Dans cette affaire comme dans les autres, ne vaut-il pas mieux éviter d’agir unilatéralement ? Ne faut-il pas, au contraire, promouvoir la négociation et le multilatéralisme ? C’est la position que la France a soutenue jusqu’à présent. Ce n’est cependant pas la position défendue par tous les acteurs. À cet égard, l’intervention unilatérale décidée par le président Erdogan n’a surpris personne : nous l’avons déjà vu agir ainsi en Méditerranée orientale, au Levant et, à présent, dans le Caucase.

La France peut-elle faire ce qu’elle reproche au président Erdogan, c’est-à-dire agir unilatéralement ?

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