Intervention de Bernard Angels

Réunion du 3 décembre 2005 à 15h15
Loi de finances pour 2006 — Compte de concours financiers : avances à divers services de l'état ou organismes gérant des services publics

Photo de Bernard AngelsBernard Angels, rapporteur spécial de la commission des finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la nation :

Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, la mission « Gestion et contrôle des finances publiques » constitue le « coeur de métier » de Bercy.

Compte tenu du temps très court qui m'est imparti pour évoquer ce qui constitue, en termes de crédits et d'effectifs, la principale mission du ministère de l'économie, des finances et de l'industrie, je ferai seulement quelques réflexions sur ses objectifs et ses performances.

Grâce à l'indéniable avance de Bercy, due aux « contrats de performances », les indicateurs ont pu être améliorés au fil du temps. Ils sont disponibles sur des séries temporelles longues, ce qui facilite les comparaisons et les rend crédibles pour le Parlement. Nous pouvons éviter de débattre des moyens, pour nous concentrer sur la performance et les améliorations possibles, à travers deux réflexions.

La première porte sur la productivité. Les efforts dans ce domaine, qui vont de pair avec l'objectif affiché d'améliorer la qualité du service rendu aux usagers, seront poursuivis, et même accélérés, en 2006. Sur l'ensemble de la mission, nous notons ainsi la réduction de 2 419 emplois.

Cette mission est l'une des rares du budget général à se plier à la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux ; il ne faudrait pas, d'ailleurs, que cette réduction d'effectifs nuise à son efficacité. Le programme « Soutien de la mission » affiche une volonté forte d'économiser 100 millions d'euros, en 2006, et 150 millions d'euros, en 2007, grâce à la modernisation des achats.

J'exprimerai un souhait, celui que le sens de cet effort de productivité soit partagé par les agents du ministère. De ce point de vue, le taux de connaissance des évolutions du ministère de l'économie et des finances déclaré par les agents apparaît faible. Sa valeur cible est de 55 % seulement à l'horizon 2008. En outre, cet indicateur ne permet pas de mesurer l'adhésion des agents à ces évolutions. Or la performance d'une communication tient à sa capacité à convaincre !

En outre, les procédures d'intéressement des personnels du ministère à la performance appellent une stratégie claire, si possible partagée par les agents. Aux primes pour sujétions particulières se sont ajoutés successivement des gratifications individuelles au mérite, pour les principaux cadres du ministère, en 2004, l'annonce d'une prime collective de performance de 400 euros, pour un nombre limité d'agents, puis un nouveau mécanisme d'intéressement de tous les agents aux résultats de leur direction. En matière de rémunération au mérite, la lisibilité est de mise pour réussir toute réforme !

Enfin, un objectif paraît ignoré, celui qui découle de la « présence territoriale » des administrations financières, déterminée par un impératif d'aménagement du territoire pourtant reconnu par le Gouvernement. Ainsi, 650 trésoreries emploient moins de trois agents et reçoivent de cinq à dix visites par semaine. Quel avenir leur sera-t-il réservé ?

Ma seconde réflexion porte sur la modernisation de l'impôt. Les indicateurs liés au respect de leurs obligations fiscales par les contribuables montrent que les administrations fiscales ont déjà atteint un bon niveau dans l'encouragement au civisme fiscal. Il reste à continuer de réfléchir à la faisabilité et aux avantages de la retenue à la source.

Je tiens à souligner cependant trois insuffisances.

D'abord, l'indicateur de la part des recettes de TVA acquittées par télérèglement révèle que, à ce stade, la procédure de téléTVA constitue un semi-échec, lié à l'insuffisante attractivité du produit aux yeux des entreprises. Avec 81 500 télédéclarants en 2004, les résultats restent très éloignés de la cible de 2005. L'abaissement du seuil du chiffre d'affaires au-delà duquel la téléprocédure est obligatoire ne sera pas de nature, à lui seul, à garantir le succès du produit téléTVA.

Ensuite, l'indicateur relatif au nombre de particuliers ayant souscrit leur déclaration de revenus par Internet manifeste des ambitions certaines, puisqu'il vise dix millions de télédéclarations en 2006 et quinze millions en 2008. Ces objectifs sont indéniablement facilités par la réduction d'impôt de vingt euros introduite sur l'initiative de notre commission des finances. Néanmoins, l'augmentation rapide du nombre de télédéclarants à l'impôt sur le revenu doit aller de pair avec une amélioration, toute aussi rapide, de la fiabilité et de la qualité de service du site « impots.gouv.fr ».

Ainsi, il convient de renforcer la fiabilité du système d'information, qui, malheureusement, a connu des ratés lors de la campagne de 2005. Il faut, surtout, améliorer les services offerts en ligne aux contribuables. L'absence d'interface commune entre les pages consacrées à la déclaration et à la consultation du compte fiscal, d'une part, et celles consacrées au paiement de l'impôt, ainsi qu'aux changements d'adresse, d'autre part, rend en effet la consultation du site « impots.gouv.fr » trop peu conviviale. L'obligation, pour la déclaration d'impôt sur le revenu et, pour chaque adhésion à la mensualisation des différents impôts, de disposer d'identifiants distincts, fort complexes, fait sentir la nécessité d'un identifiant fiscal unique.

Enfin, les indicateurs relatifs aux taux de recouvrement des créances de contrôle fiscal et des amendes et condamnations pécuniaires affichent des valeurs cibles trop peu ambitieuses à mes yeux.

Le taux de recouvrement des créances fiscales reste limité. Alors que 1 420 personnes à temps plein sont affectées à la direction générale de la comptabilité publique, la DGCP, le taux de recouvrement contentieux des amendes et condamnations pécuniaires était de seulement 34 % en 2004. Il devrait passer à 42 % en 2008.

Je ne mésestime pas les difficultés inhérentes à ces recouvrements, et la distinction des taux selon la nature du recouvrement contentieux - amendes majorées ou décision de justice -, serait d'ailleurs la bienvenue. Toutefois, les montants financiers en jeu exigent des efforts accrus de la part des administrations concernées. Je m'interroge, d'ailleurs, sur l'opportunité de réaliser un travail de contrôle sur ce sujet en 2006.

En conclusion, sous ces réserves, la majorité de la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, les crédits proposés pour la présente mission et les deux missions « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et « Prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés ».

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