Intervention de Dominique Voynet

Réunion du 3 décembre 2005 à 23h00
Loi de finances pour 2006 — État b

Photo de Dominique VoynetDominique Voynet :

Cet amendement est identique au précédent et mon argumentation sera donc proche de celle de M. Bizet, rapporteur pour avis, mais je tiens à faire le point sur la crédibilité des engagements français en matière de lutte contre les changements climatiques.

La loi du 19 février 2001 qui a, à la fois, considéré comme une priorité nationale la lutte contre les changements climatiques et mis en place l'Observatoire national des effets du réchauffement climatique, a été adoptée à l'unanimité non seulement du Sénat, mais aussi de l'Assemblée nationale.

Jusqu'alors, personne n'a contesté l'utilité de cet outil. Simplement, il me semble que bien des éléments peuvent nous faire douter de la solidité et de la profondeur de l'engagement de la France en matière de lutte contre les changements climatiques.

J'en veux pour preuve la faiblesse de nos contributions financières au plan international. La France paie en général peu et tardivement ses contributions au programme des Nations unies pour l'environnement, elle abonde d'une façon extraordinairement faible les crédits destinés au secrétariat de la convention-cadre des Nations unies contre les changements climatiques, elle finance trois fois moins que l'Allemagne, quatorze fois moins que les États-Unis et vingt fois moins que le Japon un groupement international d'experts et de scientifiques mobilisés sur les changements climatiques. Cela ne l'empêche pas de donner des leçons au monde entier !

Le programme national de lutte contre le changement climatique constitue probablement le coeur du débat. En effet, quelques jours à peine après avoir publié un rapport critique sur l'efficacité dudit programme, les parlementaires ont décidé de supprimer les crédits de l'ONERC.

L'ONERC déplorait le réel manque d'efficacité des outils mobilisés pour aboutir à une baisse des émissions de gaz à effet de serre, notamment dans le secteur des transports, qui suscite aujourd'hui les plus grandes préoccupations compte tenu de la très faible « substituabilité » du pétrole.

Et l'ONERC ajoutait : nous rencontrons de grandes difficultés parce que nous ne prenons pas en compte le chantier de l'adaptation au changement climatique, ce qui est très préoccupant pour les départements et territoires d'outre-mer. Ceux-ci sont en effet particulièrement vulnérables au regard du risque à la fois d'élévation du niveau des océans et d'augmentation de la fréquence et de la gravité des événements climatiques extrêmes que sont les cyclones.

Nous avons besoin de moyens et d'outils adaptés. La protection ne suffit pas ; il faut également observer les phénomènes climatiques et en assurer le suivi.

Enfin, vous avez, madame la ministre, insisté sur le fait que l'ADEME bénéficierait désormais de taxes affectées. Pour ma part, je n'y vois pas d'inconvénient. En effet, les expériences conduites entre 1997 et 2002, dont j'assume la responsabilité, ont montré qu'il pouvait être périlleux, pour un établissement public, de compter pour l'essentiel sur des mesures budgétaires, donc sur la volonté politique des différents gouvernements.

Le budget de l'ADEME a connu des mouvements d'accordéon préjudiciables à la conduite de politiques qui sont importantes pour l'environnement. Il y a un décalage de plus en plus manifeste entre les moyens et les missions de l'ADEME, au rythme des amputations de crédits et des gels budgétaires.

Je n'évoquerai ni les déchets, ni les sols pollués, sujets pourtant très préoccupants en ce moment, pour me concentrer sur le changement climatique, dans un contexte où les énergies fossiles seront moins abondantes.

Nous devons impérativement changer d'échelle et adopter des politiques qui soient à la fois bonnes pour la planète, bonnes pour l'emploi, bonnes pour les comptes de la nation et bonnes pour le porte-monnaie des usagers. Nous devons relancer une politique d'efficacité énergétique, de maîtrise des consommations. Car le problème est d'une telle ampleur qu'aucun être humain, sur la planète, ne pourra échapper à une révision drastique de son comportement et de ses habitudes de consommation.

J'entends dire que les « points Info-Énergie » seraient menacés ; j'entends dire que ce sont aux collectivités locales que seraient confiés le soin de piloter les démarches Agenda 21 et la mise en place des plans de développement durable et des programmes d'efficacité énergétique.

Je ne peux pas le croire ! La lutte contre les changements climatiques est une grande priorité nationale. Donnons-nous les moyens de ne pas seulement parler de ces questions.

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