Monsieur le président, madame la ministre, à l’occasion du débat sur les crédits de la mission « Sécurités », permettez-moi, tant en mon nom personnel qu’au nom de mon groupe, de marquer mon soutien aux forces de police et de gendarmerie et à l’ensemble des services de la sécurité civile, notamment les sapeurs-pompiers, qui ne sont pas épargnés, ainsi qu’à nos militaires, qui assurent au quotidien la sécurité des Français.
Jamais le climat social n’a été aussi tendu et jamais la demande d’ordre n’a été aussi multiple. De la sécurité des maires et des élus, en passant par celle des transports, la lutte contre les trafics et celle contre le terrorisme, la cybercriminalité, les débordements et violences des rues, les violences faites aux femmes, la demande de sécurité est polymorphe et urgente. Elle est aussi impérative, pour que notre pays ne glisse pas dans les bras extrêmes, qui encaissent cash les bénéfices des désordres que nous voyons trop souvent sur les chaînes d’information continue.
Le dialogue a disparu de nos sociétés et fait place aux invectives relayées par les médias et les réseaux sociaux. La violence est un signe de mauvaise santé de notre société. Face à ce constat que chacun peut faire, il nous appartient de tenter d’apporter des solutions, mais l’ajustement du curseur n’est pas toujours facile.
L’an dernier, notre débat se déroulait en pleine crise des gilets jaunes. La semaine dernière, des violences inadmissibles ont été commises contre des policiers, mais aussi contre des manifestants.
On le voit bien, le climat de confiance entre les forces de sécurité et les citoyens se détériore. Pour préserver cette indispensable confiance, il faut que notre police républicaine soit irréprochable, madame la ministre. Je ne doute pas qu’elle le soit dans son immense majorité, mais une petite minorité vient salir le travail et l’engagement de dizaines de milliers de fonctionnaires. L’inspection générale de la police nationale (IGPN) se trouve dès lors au cœur des débats.
L’IGPN a connu des évolutions et des améliorations, notamment avec la plateforme interne « signal-discri ». Si la fonction de renseignement de l’IGPN ne semble pas devoir être critiquée, tel n’est pas le cas de sa mission de contrôle.
Pendant l’année 2019, selon son dernier rapport, 1 460 enquêtes judiciaires ont été menées. Cette hausse est notamment due à la multiplication des mouvements sociaux.
Face aux critiques, madame la ministre, comment envisagez-vous de mener la réforme de l’IGPN qui a été annoncée ? À mon sens, cette réforme ne peut être définie qu’avec la participation du Parlement, tant dans son principe que dans son périmètre. Nous devons être complètement associés à une telle réforme de l’IGPN, dans ces deux composantes.
Il convient de revoir la composition de cette structure afin d’assurer l’indépendance des enquêtes. Actuellement, l’IGPN est composée de 285 agents ; 72 % d’entre eux sont des policiers, 18 % appartiennent au personnel administratif et 1 % au personnel technique ; enfin, 9 % d’entre eux – magistrats, adjoints de sécurité – relèvent d’autres catégories.
Dans d’autres pays européens, les organes de contrôle des services de police sont composés en partie de membres de la société civile ; il arrive même qu’ils soient indépendants du ministère de l’intérieur.
C’est le cas au Royaume-Uni, mais aussi en Belgique, où l’organisme chargé de contrôler l’action de la police, le Comité permanent de contrôle des services de police, ou « Comité P », est dirigé par un magistrat choisi par le Parlement. Ce magistrat est assisté d’un bureau de direction où figurent des représentants de la société civile. Il faut avouer que cette formule est assez séduisante si l’on veut redonner au Parlement son rôle dans cette mission de contrôle.
Au Danemark, l’Autorité indépendante des plaintes concernant la police, chargée de contrôler l’action de cette dernière, est placée sous la tutelle du ministère de la justice.
Dès lors, sans même être rendue indépendante du ministère de l’intérieur, l’IGPN pourrait comprendre un comité citoyen, ou d’autres membres de la société civile, ainsi que des magistrats et, pourquoi pas, des élus.