Intervention de Esther Benbassa

Réunion du 3 décembre 2020 à 21h45
Loi de finances pour 2021 — Immigration asile et intégration

Photo de Esther BenbassaEsther Benbassa :

Madame la présidente, madame la ministre, mes chers collègues, la covid-19 a engendré de graves dysfonctionnements au sein de l’administration française, démontrant au passage la défaillance criante des pouvoirs publics à l’égard des personnes migrantes, notamment dans les centres de rétention administrative (CRA), devenus de véritables clusters. Dans celui de Plaisir, dans les Yvelines, que j’ai visité lundi dernier, ne se trouvent rassemblées que des personnes malades : on surnomme d’ailleurs ce centre le « CRA-covid », ce qui interpelle tout de même !

Face à ce constat, le ministre de l’intérieur propose une hausse de 2 % des crédits de la mission « Immigration, asile et intégration ». Ce budget n’évite pas certains écueils des années précédentes. Il en est notamment ainsi du traitement de la lutte contre l’immigration irrégulière, dont le budget augmente de 16 % en crédits de paiement, soit une hausse de 68, 1 % depuis 2017.

Il est grand temps qu’un virage humaniste soit de mise sur cette thématique. En ce sens, nous approuvons la création de 6 000 places cette année dans les centres d’hébergement d’urgence pour migrants, ainsi que la légère hausse du budget pour les dispositifs d’intégration et d’accueil sur le sol français. Ces signes sont encourageants, quoique timorés. Heureusement que les associations sont là pour nourrir les migrants qui dorment encore dans la rue.

Nous ne pouvons pas nous permettre d’appréhender la question de l’immigration et de l’accueil sous le seul prisme de la comptabilité budgétaire. Ce qui manque au Gouvernement, c’est une vision globale et surtout de long terme.

Globale, tout d’abord, car cela fait des années que nous sommes incapables de réformer, avec les autres pays européens, le règlement de Dublin qui met les personnes migrantes dans des situations de précarité et de détresse indignes des valeurs défendues par l’Union européenne.

Sur le long terme, ensuite, parce que les moyens accordés à l’Ofpra ne sont pas suffisamment ambitieux pour affronter les flux migratoires qu’engendreront les dérèglements climatiques des décennies à venir. Selon certains experts, d’ici à 2050, près de 1, 5 milliard de réfugiés environnementaux pourraient tenter de rejoindre l’Europe.

Madame la ministre, nous saluons les timides efforts que comprend ce PLF pour 2021, notamment en matière d’accès au droit d’asile et à l’intégration, mais aussi en termes de création de places d’hébergement pour les exilés. Cependant, une fois encore, le budget de cette mission fait la part belle à la lutte contre l’immigration irrégulière.

Par ailleurs, les faits de violences policières sur des migrants, perpétrés le 23 novembre dernier, démontrent que l’approche gouvernementale en matière d’immigration reste répressive.

Ainsi, les membres du groupe Écologiste – Solidarité et Territoires voteront contre le budget de la mission « Immigration, asile et intégration ».

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