Intervention de Thani Mohamed Soilihi

Réunion du 14 décembre 2020 à 15h00
Conseil économique social et environnemental — Rejet en nouvelle lecture d'un projet de loi organique

Photo de Thani Mohamed SoilihiThani Mohamed Soilihi :

Monsieur le président, monsieur le garde des sceaux, mes chers collègues, à la suite de l’adoption en commission des lois d’une motion de notre rapporteure, nous examinons aujourd’hui le projet de loi organique tel qu’adopté par l’Assemblée nationale en nouvelle lecture.

Nous ne le déplorons pas sur le fond, puisque ce texte intègre certains apports utiles du Sénat, ainsi que des dispositions qui nous apparaissent toujours très bienvenues pour redonner au CESE la place qui lui revient aux termes de la Constitution. Ces dispositions sont aussi de nature à faire du CESE le « carrefour des consultations publiques » et de la participation citoyenne.

Nous pouvons toutefois le regretter sur la forme.

Je ne m’attarderai pas sur le constat, partagé sur toutes les travées, du déficit de visibilité de cette assemblée consultative, qui ne fait pas justice à la qualité de ses travaux. La proportion croissante des autosaisines – elle atteint 80 % en 2020 – parle d’elle-même.

À ce titre, plusieurs dispositions ont fait l’objet d’un accord à l’issue de la première lecture entre les deux assemblées. Elles manifestent un objectif partagé d’accroissement du nombre de saisines du CESE et de renforcement de sa capacité à y répondre.

Je pense à l’article 5 relatif à l’extension de la procédure simplifiée pour l’adoption des avis.

Je pense également aux articles relatifs à la déontologie des membres du CESE, dont notre rapporteure a parfait la rédaction en première lecture.

S’agissant du renforcement de la saisine du CESE par voie de pétition, les deux chambres ont consenti non seulement au dépôt des pétitions par voie électronique, mais également à la faculté, pour les mineurs de plus de 16 ans, d’en être signataires. Je sais votre attachement, monsieur le garde des sceaux, à cette disposition, animée par l’ambition de préparer ce groupe d’âge à l’exercice de sa citoyenneté.

D’autres dispositions sont marquées par un désaccord de fond ; je pense aux articles 4, 6, 7 et 9. Force est de reconnaître que l’Assemblée nationale a entendu certaines de nos réserves.

Vous ne serez pas étonnés, mes chers collègues, que j’évoque ici la question de la composition du CESE.

À la différence du projet de loi organique initial, la rédaction actuelle maintient une garantie chiffrée sur la représentation des outre-mer au titre de la cohésion sociale et territoriale, présente dans le droit en vigueur et que notre Haute Assemblée avait utilement rétablie.

Je salue cette garantie spécifique, dérogeant au renvoi à un décret opéré pour la composition des autres catégories. Bien sûr, nous pourrions discuter du chiffre, ramené à l’Assemblée nationale de onze à huit. Il est proportionnel à la réduction globale de 25 % du nombre de membres. Et vous l’aviez rappelé, monsieur le garde des sceaux, il reste sans préjudice de la présence de représentants des outre-mer au sein d’autres catégories. J’y serai bien sûr attentif et le comité de suivi rétabli à l’Assemblée nationale n’apparaît, en ce sens, pas dénué d’intérêt.

Pour terminer, je ne peux qu’exprimer un regret sur le désaccord de principe, acté par notre rapporteure dès le commencement des débats, sur la question du tirage au sort.

Il a été dit que l’inscription dans la loi organique de ce procédé fragiliserait les fondements de notre démocratie et, pire, qu’il acterait l’avènement d’une « démocratie de la courte paille ». Pourtant, il n’est en aucun cas question de substituer des membres tirés au sort aux représentants de la société civile. Il ne s’agit pas non plus, puisque le caractère consultatif est bien précisé, de substituer le tirage au sort à la légitimité de l’élection qui, seule, peut asseoir par le mandat la décision souveraine.

Nous regrettons ce point de crispation initial, qui a d’ailleurs animé nos débats. S’agissant des consultations publiques, une position commune aurait pu émerger. Il nous apparaît que, plus que le seul procédé, c’est la question du processus qu’il faut examiner. Les garanties procédurales, renforcées à l’Assemblée nationale par la nomination de garants, conforteront la pertinence et la qualité de cette participation citoyenne.

Pour toutes ces raisons, le groupe RDPI s’opposera à la motion déposée par la rapporteure.

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